vendredi 11 août 2023

12 août - Bivocco Bonelli > Berserzio

Je me réveille dans le cadre idyllique du lac d'Apsoi.

Il n'a pas fait froid malgré les 2300 m d'altitude mais tout est trempé par la proximité du lac : la tente mais aussi les affaires que j'ai mises à sécher.

Malgré les conditions optimales, rien ne va ce matin. Du moins mon cerveau n'arrive pas à enchaîner les multiples tâches correctement. Je perds un temps fou alors que l'objectif est d'aller à va ville de Berserzio à 18 km.

Au moment de mettre ma chemise, mouillée comme il se doit, je m'aperçois que la manche est déchirée à l'épaule. Pas le choix, il faut recoudre sinon le trou risque de s'agrandir. Encore une belle perte de temps.

Plus on veut aller vite, plus on perd du temps. Le chemin que je dois emprunter se trouve au dessus de ma tête à une centaine de mètres. Qu'à cela ne tienne, j'attaque directement la pente pour le rejoindre au lieu de faire le tour par où je suis venu. C'est tellement pentu que je monte tout doucement et je risque surtout de me casser la gueule à tout instant. Je fais des zig zags, tombe sur des barbelés. Doit revenir sur mes pas. Bref je perds un temps monstre.


Je finis par reprendre le chemin. Ce que je vois devant moi est à la fois magnifique et effrayant. Magnifique car extrêmement minéral avec des montagnes majestueuses mais effrayant car une moraine forteresse se dresse en travers de la voie. D'ailleurs j'ai beau regarder partout, je ne vois aucun moyen de sortir de la couronne de hauts sommets qui nous entoure.


Bien sûr je suis totalement seul noyé dans cette marée de rochers. Cela ajoute à la solanité du moment.

Je me demande bien comment quelqu'un a pu avoir l'idée de chercher un passage par ici. J'avance pas à pas dans ce labyrinthe de roches et je suis surpris à chaque virage de trouver un signe rouge et blanc qui m'amène au virage suivant.

Bientôt c'est le col qui se dresse devant moi. Il s'agit littéralement de grimper sur un mur haut d'une centaine de mètres. Le principe est d'avancer pas à pas en assurant bien ses appuis dans une terre meuble et des graviers qui roulent sous les semelles. Un numéro d'équilibriste qui demande à rester hyper concentré pour éviter le faux pas fatidique. 


C'est long et épuisant de rester sur ces garde sur ces traces qui n'en finissent pas de zigzaguer pour avoir une pente acceptable. Bientôt le poteau qui marque le col est à quelques encablures. Il faut juste rester concentré.

Une fois au col, tout ne s'arrête pas là. 


Il faut redescendre et l'autre face fait honneur à la précédente. Je me demande si ce n'est pas moins dangereux de monter que de descendre.


Une fois la difficulté sommitale passée, il reste une longue bavante qui slalome dans la prairie. Je croise enfin les marcheurs à la journée qui montent au col d'Enchiausa. Il est 11h. D'habitude je les croise plus tôt ce qui me laisse à penser que la côte est longue. 

Effectivement il est midi lorsque j'arrive au fond de la vallée et se présente à moi 2 options. A gauche le refuge et un repas chaud, à droite j'attaque la journée du lendemain. Je me rappelle que le dernier refuge ne servait qu'à midi trente. De plus ce matin j'ai perdu beaucoup de temps au démarrage... Conclusion j'attaque la journée du lendemain.

Je croise un cours d'eau. Les points d'eau sont de plus en plus rares. Il va falloir que je commence à bien calculer mes ravitaillement. Les bivouacs aussi vont être plus compliqués.
Je ravitaille en eau et j'en profite pour faire la tambouille avant d'attaquer la montée.

Je vois des Vétetistes descendre le sentier que je dois prendre. Cela veut dire une seule chose : le sentier est très roulant donc une longue bavante pour moi.

Effectivement il s'agit d'un immense versant herbeux ou zigzague un sentier à perte de vue. Au milieu du décors trône 2 bunkers. Je suis étonné de leur orientation car ils sont tournés sur l'Italie... C'est vrai que derrière il y la France mais la vallée que je remonte est 100% italienne.


Quand j'arrive au niveau du bunker, ma curiosité me pousse à demander à un couple d'italiens qui ressortent du bâtiment. Ils n'ont pas plus d'explications que moi à cette étrangeté. En passant l'intérieur du bunker est d'une propreté exemplaire. Pas de détritus, pas de tags, rien. En France, ils sont vandalisés en permanence et il faut se boucher le nez pour les visiter. Pas ici.


Une chose est sûre j'arrive sur une zone qui a été fortement militarisée. Le GTA utilise une piste militaire qui a dû demander un effort considérable pour l'établir. Par contre cette piste n'est plus entretenue depuis bien longtemps. Les avalanches, éboulements et autre effondrements ont eu raison d'elle. Seul un piéton peut encore l'utiliser et encore il faut escalader des rochers et des pierriers qui ont remplacé la piste. Par moment, il n'y a plus de piste du tout emportée par un caprice de la nature 


Je me demande vraiment ce qui a pris l'état major de mettre en place une telle infrastructure dans une zone où il n'y a pas une goutte d'eau.
En tout cas j'en profite pour marcher à flanc de montagne pendant quelques km. Ce qui m'inquiète c'est que Berserzio comme tout village est à fond de vallée. Il va bien falloir descendre. Et effectivement, ça ne rate pas : à la fin de la piste on plonge littéralement vers le village que je distingue en tout petit en contrebas.

Nous sommes Samedi. Si je n'arrive pas à ravitailler ce soir, demain dimanche, cela risque de ne plus être possible. Moralité pas question de ralentir, il faut arriver avant la fermeture du Mini market.

A vrai dire, j'en ai plein les pattes et cette descente et l'allure forcée est de trop. Je ressors mon MP3 que je n'ai quasiment pas utilisé durant ce voyage. J'évite de la faire car je regarde moins autour de moi et je réduis ma capacité d'émerveillement. Mais là à cette heure, il ne s'agit plus de s'émerveiller mais bien de ne pas craquer.

Cette descente me paraît interminable mais elle a heureusement une fin. Je fonce vers l'épicerie qui est ouverte. Comme d'habitude, il n'y a pas grand chose mais on peut acheter de la charcuterie et du fromage. 

Le commerce est littéralement pris d'assaut par des ordres de touristes. Il faut faire une queue interminable pour être servi puis pour payer en caisse. J'ai passé la journée à transpirer en plein soleil. Je sais que je sens horriblement mauvais mais nous sommes les uns sur les autres en train d'attendre.

Le village est tellement bondée que l'épicerie n'a plus de pain. Il faut revenir demain à 8h30 pour en avoir. C'est la base de mon alimentation. Pas le choix il faudra revenir demain. La bonne nouvelle c'est qu'ils sont ouverts le Dimanche. J'ai forcé pour rien.

Je me dirige alors vers le camping. Et a voir le nombre de voitures qui traversent le village dans les 2 sens, je le doute de ce qui va se passer. Ça ne rate pas et le camping est bourré jusqu'à la gueule. La seule chose qu'on me propose est de dormir au fond du parking des voitures.
On a vu mieux comme environnement mais pour une nuit. Et dans mon état, je suis bien content qu'on m'accepte. Douche chaude, lavage des habits. Que vouloir de plus.

J'ai un voisin de chambrée, Ricardo, qui vient lui aussi d'accepter de dormir dans le parking car il vient de faire les 3 villages de la vallée sans trouver de place. Il dispose d'une tente qui est fixée sur le toit de sa voiture et qui se déplie.Il parle un excellent anglais (il a vécu en Australie). Nous sympatisons et passons la soirée ensemble à parler des pays qu'il a visités. Nous en avons beaucoup en commun. Il a même séjourné à Tamanrasset !

2 bières plus loin, il est déjà minuit et il est temps d'aller se coucher. Demain la grasse matinée sera de mise à cause de l'arrivée tardive du pain ...

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