mardi 31 juillet 2018

31Juillet - Pipestone Lake

Il fait froid ce matin comme le prouve la gelée blanche qui envahit la plaine où nous nous sommes installés. Nous sommes bien de retour dans les montagnes et les vêtements chauds sont de mise. Les gants sont de rigueur pour ne pas se geler les mains. Paul qui a fait son lavage hier soir doit enfiler ses vêtements mouillés qui n'ont pas eu le temps de sécher.

C'est vraiment étonnant de penser qu'en quelques jours de marche nous sommes passés d'un désert aride et brûlant à des montagnes regorgeant d'eau ou le pull est indispensable.

Nous prenons le Trail qui au bout d'une centaine de mètres nous mène devant le gué d'une large rivière où il n'y a pas de passage à sec. Paul n'hésite pas une seconde et traverse l'eau jusqu'au genou. Jules et moi, peu tentés d'avoir les pieds glacés alors que nous ne sommes pas encore réchauffés, tentons de contourner l'obstacle. En vain ! Nous n'avons pas d'autre choix que de mettre les pieds dans l'eau après avoir vainement arpenté la plaine.

Heureusement, juste après la rivière, le Trail monte ce qui permet de se réchauffer. Nous arrivons dans une nouvelle plaine valonnée. Des lacs bordent la partie gauche alors qu'une haute chaîne de montagnes se trouve à notre droite.

Jules et moi même mitraillons le paysage avec nos appareils pendant que Paul tente de battre le record de vitesse sur le Trail. Il doit chercher à doubler son ombre...

Tout au moins nous avons trouvé un rythme. Paul cherche la performance et avance comme l'éclair. Jules est juste  derrière et se repose quand Paul s'arrête pour m'attendre. On ne peut pas dire que nous marchons groupés mais tout le monde trouve son compte. Le seul problème que nous n'arrivons pas à résoudre est celui de la distance. Nous couvrons trop peu de km par jour.

Aujourd'hui nous avons pris 2 heures pour la pause déjeuner. Jules a fait la sieste et nous l'avons laissé dormir. J'espèrai que cette pause prolongée nous permette de faire plus de distance que d'habitude mais ça n'a pas été le cas. Nous avons eu de belles côtes et de larges rivières à traverser.

À chaque vallon nous découvrons des lacs plus beaux les uns que les autres. Je confirme que la réputation des Winds n'est pas usurpée. C'est vraiment un paysage de cartes postales.

En final nous n'avons couvert aujourd'hui que 23 km. L'idée était de s'installer près d'un lac pour se baigner mais des nuages sont arrivés. Nous avons même quelques gouttes de pluie qui ont coupé court la discussion de savoir si nous allions jusqu'au prochain lac à 4 km. Les tentes ont été montées à la vitesse de l'éclair pour stocker  hommes et matériel. L'ondée à été de courte durée. En final, j'ai été le seul à me laver car le soleil est revenu trop tardivement.

lundi 30 juillet 2018

30 Juillet - Cirque Des Towers

Le vent a fini par caler mais il fait bien froid pour prendre le petit déjeuner.

Le programme du jour est costaud. Nous allons passer 2 cols qui vont nous faire monter quasiment 1000 m d'altitude en cumulé.

Si nous nous imposons cette épreuve, alors que nous sommes hors tracé officiel du CDT, c'est pour accéder à l'un des plus beaux panoramas du voyage : le cirque des towers.

Nous contournons le lac au dessus duquel nous avons dormi et nous tombons sur un sentier parfaitement établi.

Nous croisons aussi 2 hikers à la journée. En réalité, nous sommes dans un coin très fréquenté car le cirque des towers est une curiosité locale que des vacanciers viennent faire en un ou deux jours. D'un côté, je préfère ça car le passage de col sans marque nous fait perdre trop de temps.

Nous croisons pas mal de personnes. Certains vont au cirque et d'autres en reviennent. Tous sont sympas et discutent avec nous. Toujours cette sociabilité typique des américains.

Le premier col est Jackass Pass. La montée est loin d'être évidente car elle est peu indiquée et il faut composer avec les rochers à escalader qui constituent l'environnement des Winds.

Mais la récompense vaut l'effort. C'est un des plus beaux spectacles qui m'ait été donné à voir depuis le début du voyage.


Nous passons le col Jackass et nous déjeunons à côté du lac Lonesome, sous le col, qui a la plus belle vue sur le cirque des towers. Même si le spectacle est époustouflant, cela ne nous coupe pas l'appétit.


Pour digérer, nous décidons de faire le 2eme col, le Texas Pass. Depuis Jackass Pass, nous avons vu qu'il est entièrement couvert de neige. Les hikers que nous avons croisés et qui en reviennent nous disent de passer à droite du col pour éviter le névé.

La pente est raide et passe entre les éboulis. À la sortie, plus de sentier et aucun cairn. Il faut y aller en gardant en vue le Texas Pass. Ce n'est pas évident de trouver la bonne voie...

Nous traverssons  le névé sommital et nous arrivons au col Texas.

Nous n'y attardons pas. De l'autre côté une pente des plus raides nous y attend. Le sentier est dangereux car le sable qui le compose se dérobe glisse sous nos pas.
Nous arrivons dans une immense vallée où coule une multitude de rivières qui finissent dans des lacs.



Nous suivons le fond de la rivière en profitant du paysage. Cela fait du bien de pouvoir avancer plus facilement quasiment à plat.

Paul et Jules sont dans une forme olympique et papi traîne derrière.
Nous croisons encore des marcheurs mais ils se font plus rares. Il y a même des lamas qui jouent les porteurs pour des gens qui viennent passer 2 jours dans le lac que nous venons de croiser.

Notre objectif est de rejoindre le tracé officiel du CDT. Pour cela nous suivons un cours d'eau. Nous avons l'intention de nous laver et dès que nous rejoignons le CDT, nous recherchons un coin à l'abri des pudiques regards de nos amis américains.

Il nous faut traverser plusieurs cours d'eau dans la plaine pour trouver l'endroit idéal avec cours d'eau, bordé de sable pour faire trempette, terrain plat pour les tentes et arbres pour attacher la nourriture en hauteur. Le cahier des charges est maintenant assez compliqué !

Nous nous installons pour la nuit et profitons des joies de l'eau pour faire trempette au soleil.

Nous n'avons parcouru que 21 km mais avalé 968 m de dénivelé. Ce faible kilométrage est dû principalement à l'état du  sentier, quand il existe. Non seulement il est très raide mais il difficile à trouver et nous oblige à des acrobaties qui nous ralentissent. Notre situation est critique vis à vis de la nourriture. Nous allons donc changer les plans pour aller dans la ville de Pinedale afin de ravitailler. Elle se trouve avant Dubois et nous pourrons la rejoindre même si nous conservons notre rythme actuel.

dimanche 29 juillet 2018

29 Juillet - Clear Lake

Ce matin les choses sérieuses commencent. Après avoir basculé du désert à la forêt, nous allons passer à la montagne. Nous avons commencé à voir les chaînes du Winds River Range dans le désert et cela fait 3 jours de marche que nous nous en approchons.

J'ai bien étudié le dénivelé pour la journée. Hier nous avons monté 500 m. Aujourd'hui nous montrerons à nouveau 500 m, en descendrons tout autant. Cela fait beaucoup de dénivelé pour espérer faire une grande distance.

Il fait froid ce matin et nous partons avec nos affaires chaudes sur le dos. Paul va au moins 2 fois plus vite que moi. Jules gère habituellement assez mal son énergie. Il essaye de suivre son frère, s'épuise et passe le reste de la journée à souffrir. Ce matin ce n'est pas le cas et il reste proche de moi. Ceci n'augure rien de bon car il doit être fatigué.

Nous commençons par une belle montée qui nous amène dans une vallée de toute beauté.
À son entrée, il y a un lac et de chaque côté des montagnes impressionnantes.

Le paysage n'a rien à voir avec le Colorado. Il s'agit de montagnes grises très abruptes.
En plus, le sol est couvert de milliers de fleurs multicolores.

On se demande toujours par où le chemin va nous amener. Le paysage est magnifique avec ses montagnes taillées à la serpe faites de granit.

Paul s'ennuie de devoir nous attendre. Jules râle de devoir suivre la cadence. Je fais de mon mieux pour suivre mais je suis clairement à la traîne par rapport au rythme que Paul voudrait imposer. Je n'ai plus 20 ans pour brûler la chandelle par les 2 bouts. J'ai encore des semaines de marche devant moi.

Comme d'habitude, il y a plusieurs trajets sur le CDT. J'ai décidé d'aller au cirque des towers par le plus court chemin. Ceci consiste au début à remonter une rivière au cœur d'une vallée.

Le sentier est très mal indiqué sans cairn ni poteau. Le tracé GPS est approximatif. Tant que nous avons une rivière à suivre tout va bien. Par contre pour passer un col, l'exercice devient plus compliqué. Il y a visiblement peu de hikers qui tentent cette alternative.


Nous nous en sortons plutôt bien et passons dans la vallée suivante.


Il n'y a aucun tracé. Nous suivons la ligne théorique des trails mais il y a peu ou pas de traces. Ceci ne va pas nous aider à trouver notre chemin.
1ers névés à traverser au dessus d'un lac.

Nous finissons par tomber sur un sentier mais celui disparaît sur la roche qui recouvre le sol.

Il y a très peu de terre et uniquement des plaques de roche lisses sur de grandes surfaces.

Nous nous dirigeons avec le GPS vers un lac que nous nous sommes fixés comme objectif. Jules est épuisé et nous devons terminer la journée rapidement. J'identifie un endroit qui devrait faire l'affaire et nous nous installons.

Ce soir nous campons près d'une rivière et d'un lac. Nous avons une belle vue sur les falaises environnementes. Seul notre compteur de km fait triste mine : nous n'avons parcouru que 20 km. À ce rythme, il nous faudra 11 jours pour arriver à Dubois alors que nous n'avons que 8 jours de nourriture. Il faut dire que les 1000 m de dénivelé ne peuvent pas nous permettre de faire mieux.

Le vent souffle comme un forcené et nous sommes frigorifiés. Je décide de me laver ainsi que ma chemise dans la rivière. J'en reviens propre mais gelé jusqu'aux os. Je mets tous les vêtements que je transporte mais rien n'y fait. Nous mangeons rapidement pour nous mettre dans nos duvets. Il pleut quelques gouttes. Le vent prend le relais en soufflant des bourasques monstreuses toute la nuit.

J'espère que les conditions météo seront plus clémentes demain.

samedi 28 juillet 2018

28 Juillet - Larsen Creek

Lever 5h30. Il fait humide et frais ce matin. Nous sommes montés en altitude et nous avons quitté le désert. Nous sommes dans la forêt et la température est plus basse quand le soleil ne brille pas. Mais nous sommes loin du froid rencontré au Colorado.

Le ciel est bien voilé ce matin. Gallant s'est levé avant nous et il repart alors que nous n'avons pas déjeuner. À la vitesse à laquelle il marche, je ne suis pas sûr de le revoir.

Nous partons alors que de courtes ondées n'arrêtent pas de nous faire mettre puis enlever nos vêtements de pluie. C'est vraiment agaçant.

Nous sommes dans les arbres et le peu de vues que nous avons sont noyées dans les fumées d'un feu assez proche devant nous. Un hiker croisé sur le Trail alors qu'il fait son plein d'eau m'explique que le feu ne sera pas un problème très longtemps car il est maîtrisé à 80%. En attendant, il nous cache le paysage.

Les enfants croisent les premiers arbres tués par les insectes. Le Trail est mal entretenu et nous devons composer avec le bois mort au travers du Trail.

Les troncs d'arbres morts servent aussi à traverser les nombreux cours d'eau.

En fin de matinée, je croise un autre hiker qui vient face à moi. Je pense rencontrer mon premier Sobo, South Bounder, autrement dit une personne qui est partie du Canada et qui descend au Mexique. Il n'en est rien. Il me montre la scie qu'il a la main. C'est un section hiker qui vient de finir les Winds où nous sommes. Il a trouvé qu'il y avait trop de bois en travers du sentier et il fait le chemin dans l'autre sens pour nettoyer le Trail des morceaux de bois qui l'encombrement. Quand je dis que les hikers sont des personnes à part !!
En tout cas il a fait de l'excellent travail car à partir de cette rencontre, le Trail est parfaitement praticable ce qui n'était pas le cas.

Nous déjeunons près d'un cours d'eau et je demande aux enfants de m'accorder une heure car je n'arrive plus à écrire mon blog. Je n'ai plus assez de temps.

Les nuages sont enfin partis et il fait chaud dans les montées qui sont raides. Nous croisons une grande rivière et nous décidons de nous y baigner. Contrairement aux cours d'eau du désert, l'eau est glacé et la baignade se transforme en trempette. Mais au moins la poussière des 2 jours de Trail est partie.

Paul est dans une forme éblouissante. Jules l'était aussi ce matin mais son état décroît au fur et à mesure des heures. En fin de journée, il traîne la patte au sens figuré comme son père au sens propre.
Du fait de mon régime hautement calorique, je traîne d'énormes quantités de nourritures qui sur 8 jours représente un poid considérable. Avec ma patte folle, mon genou recommence à gripper. Mon sac est trop lourd et demain nous commençons à grimper la montagne.  Déjà qu'aujourd'hui je me traîne, je me demande ce que ça va donner.

Notre rythme, enfin surtout le mien, ne colle pas avec nos provisions. Si nous continuons, il nous faudra 9 jours pour atteindre Dubois et nous n'avons "que" 8 jours d'autonomie. Il va peut être falloir se rationner. En attendant, même si Jules aimerait s'arrêter, il nous faut continuer un peu pour diminuer la distance. Nous nous arrêtons près d'un cours d'eau après 28 km. En montagne, ce n'est pas si mal.

Après la séance d'accrochage de sacs de nourriture dans les arbres, nous allons nous coucher. Demain ça devrait grimper sec..

vendredi 27 juillet 2018

27 Juillet - East Sweetwater River

Ma jambe fait toujours des siennes mais la journée d'hier a permis de beaucoup moins la solliciter. Je sens que je suis en rémission. Je suis content que la situation ne se dégrade pas et je pense que je vais m'en sortir sans devoir arrêter. C'est juste que mes performances vont être limitées.

En attendant, le petit déjeuner nous attend, de la même qualité et quantité qu'hier. Carmelia tente de faire une blague à Jules en lui mettant un faux insecte au fond de son chocolat chaud mais c'est un flop monumental car Jules s'en aperçoit à peine. En tout cas, tout le monde est au petit soin.

Le départ est très émouvant car nous avons été accueillis comme des membres de la famille. Bill me dit que nous sommes les bienvenus quand nous le voulons. Il me propose de revenir avec ma femme (je cite) cet hiver pour qu'il puisse me faire découvrir le coin sous la neige. Il veut nous amener à la pêche sur la glace en motoneige dans les lacs des montagnes du Wind River Range. Ça me touche beaucoup car je sais que le B&B ferme le 1er octobre. Il s'agit donc d'une "vraie" invitation. Je sais aussi que Carmelia est une experte à ce type de pêche et qu'il souhaite que Anne puisse partager de bons moments avec sa femme.


Carmelia nous donne un hug à chacun et me demande de lui envoyer un mail quand nous arrivons à Dubois. Elle s'inquiète de notre sort. Nous avons une nouvelle maman et elle est américaine.

Nous prenons la route et tout le monde est en forme. Paul a de nouvelles chaussures à sa taille, Jules a un moral d'acier et moi, moi, comme dirait la chanson de Brel, j'ai la jambe qui fait moins mal.

En réalité notre visite touristique continue. Au bout de 5 km nous arrivons à la ville de Southpass City.

Comme sa voisine Atlantic, le temps s'est arrêté en 1890 à l'époque de l'exploitation minière de l'or. Sur le chemin, il y a une immense mine qui se visite.

Southpass a poussé le concept encore plus loin et a transformé les maisons du village en musée.

En tant que hikers du CDT, l'entrée est gratuite. Nous visitons les maisons et découvrons la vie des mineurs du Far West.
Le saloon a l'époque.
Encore une prison. Décidément !

Nous ne sommes pas partis pour faire des étincelles en km aujourd'hui...

Aprés notre visite culturelle, nous reprenons le trail pour notre dernière partie de désert. Nous avons même droit aux nuages sans la pluie. Les montagnes deviennent de plus en plus proches. Le profil s'en ressent et nous avons de plus en plus de montées et descentes.

Les arbres refont leur apparition. Mais surtout l'eau douce est de retour et nous avons des ruisseaux à profusion.
La fin du désert. D'un coup, d'un seul, des arbres à profusion !
Et c'est le retour dans le tunnel vert.

Alors que nous faisons le plein pour notre camp du soir, un hiker arrive dans notre dos. Je le connais. Il s'agit de Gallant un Sud Coréen qui marchait avec un Belge au Nouveau Mexique. Je l'ai croisé régulièrement et je le pensais bien loin devant car il marche à la vitesse de l'éclair. En réalité, il a pris 2 semaine pour visiter Las Vegas et Los Angeles avec un de ses amis. Il est vrai que les asiatiques sont absents sur le Trail. À vrai dire il n'y a même que des blancs... En tout cas, il est de retour sur le Trail et lui aussi est content de retrouver une figure familière car comme moi, il ne connait plus personne. Nous décidons de partager un campement.
Paul et Gallant
Gallant me raconte sa vie et comme à chaque fois, je trouve que les hikers sont des personnes à part. Il a réussi des études qui en final ne l'intéressaient pas car il voulait voyager. Sponsorisé par Mitsubishi, il a traversé le Brésil et l'Argentine avec un "Food Truck" (une sorte de camion pizza itinérant où l'on fabrique et vend de la nourriture). Il vendait de la cuisine mexicaine à la mode coréenne (food fusion).
La Corée l'a appelé sous les drapeaux pour les 2 ans de service militaire. Il a décidé d'intégrer les commandos de marine pour "devenir plus fort". L'expérience s'est terminée en Somalie au combat.
Il a décidé de faire le PCT pour se vider la tête après cette période traumatisante.
Aujourd'hui il fait des photos de ses voyages pour les exposer. Je ne suis pas convaincu qu'il arrive à en vivre.

Nous passons une bonne soirée et le niveau d'anglais de Gallant - qu'il a appris sur le PCT - permet aux enfants de suivre.

Son repas est constitué uniquement d'une pomme et d'une banane. Nous sommes complètement épatés au point que Paul lui donne un Snicker qu'il ne mangera que le lendemain au petit déjeuner. 

Comme nous sommes en territoire Grizzly, nous devons prendre la nourriture dans les arbres. Gallant s'aperçoit qu'il a perdu sa corde et je lui donne la moitié de la mienne. J'ai de toute façon acheté une corde pour les enfants.

Il est temps d'aller se coucher...

jeudi 26 juillet 2018

26 Juillet - Zéro À Atlantic City

Vu notre arrivée tardive et l'état des troupes, il n'est pas question de repartir ce matin sur le Trail. Nous prenons donc un zéro à Atlantic City.

Nous commençons par le petit déjeuner. Il est pantagruélique. Il se déroule dans le salon de nos hôtes, Carmela et "Wild Bill", qui sont tous les 2 aux fourneaux. Tout est à volonté et il y a même un record du nombre de pancakes à manger. Il est actuellement de 27. Nous laissons ce challenge à nos amis boulimiques sans pour autant donner notre part aux chiens.

Il y a un autre hiker, Chris, qui lui aussi a décidé de faire un zéro à Atlantic City. Il faisait partie des clients du saloon hier soir et il y passera la journée complète aujourd'hui. Chacun se repose à sa manière...

À peine remis du petit déjeuner, Carmela nous offre des cookies et de la limonade. Les sucreries sont sa spécialité et son surnom est "Cookie Girl". En les gouttant, on comprend vite pourquoi. Ils sont à se damner.

Je discute avec "Wild Bill" qui est un vrai personnage du Far West. Fils d'une famille de 10 enfants, son père, négociant en fourrures, l'a élevé au milieu des trappeurs du Nebraska. Il a attrapé le virus. À 13 ans, il a commencé à gagner sa vie comme bûcheron en taillant des planches dans les arbres. Il a lui aussi négocié des fourrures avant d'acheter sa première ferme. Rapidement il en a acheté une deuxième et comme il ne pouvait pas se passer de la trappe, il a crée une "game farm" oú on élève des oiseaux pour en faire des lâchers pour les chasseurs. La trappe avait lieu sur les terres de sa ferme.

À 50 ans, comme ses enfants ne voulaient pas prendre la suite, il a tout vendu pour venir s'installer à Atlantic City oú il venait chasser et pêcher chaque année depuis 14 ans. Car sa passion reste la trappe. Il ne chasse que du gros gibier et principalement des élans. Aux US, il faut un permis pour le gros gibier qui est attribué selon le cheptel et un système de lotterie. Le permis coûte de 600 (élan) à 1500$ (bison) pour un animal.
La douce Carmela chasse elle aussi avec son mari et elle a déjà tué un bison.

Bill a monté un magasin d'armes à feu car l'activité est complémentaire à sa passion. Il crée ses propres armes aussi bien pour son propre usage que pour les vendre. Il fait aussi des couteaux.

L'été, la chasse est fermée et ils ont décidé de faire B&B pour voir du monde. Atlantic City ne compte que 20 habitants l'hiver. Le B&B est réservé uniquement aux hikers et aux cyclistes qui font le CDT. De ce que je comprends, Bill n'a pas besoin de ces activités pour vivre. Comme tous les chasseurs que je rencontre, et ils sont nombreux sur le CDT, c'est un amoureux de la nature. C'est compliqué pour un européen de comprendre comment on peut à la fois aimer la nature et tuer des animaux. Ce que je comprends des discussions que j'ai avec eux, c'est que les chasseurs partent plusieurs jours à pied pour traquer les animaux et qu'il faut parfaitement connaître leur environnement pour avoir une chance de les approcher. Il est vrai que le pays est vaste et que le gibier ne manque pas. Quand je parle des biches à Bill, il me dit qu'il n'a jamais tiré et ne tirera jamais sur une biche car c'est bien trop facile.
Le rapport de force est différent aussi. Lorsque le gibier est tué, il faut le ramener à son véhicule. Les coups de feu attirent les ours qui veulent récupérer le gibier. Bill me montre un puma qu'il a tué alors que celui-ci l'attaquait en lui sautant dessus depuis un arbre.

Ce qui est étonnant, comme dans le cas de Robert, le policier à la retraite de Dallas, c'est que Bill et sa fête Carmelia ont un cœur d'or. Ils feraient n'importe quoi pour faire plaisir et découvrir leur petit paradis qu'ils adorent.

Paul a des ampoules : il a droit à un bain de pieds avec des sels, des pansements. Carmelia trouve un magasin à Lander où l'on vend des chaussures de hikers. Elle nous amène en ville en profitant pour faire le guide touristique et en nous donnant des tas de détail passionnant sur Atlantic City.
Un magnifique canyon sur la route de Lander, WY où Carmela nous amène.

Cette ville se trouve proche du "California Trail" et de l'Oragon Trail et ce sont des milliers de chariots qui sont passés par là lors de la ruée vers l'Ouest.
Atlantic City est une ville minière qui a vu sa petite apogée lors de la ruée vers l'or. Il y a des mines partout creusé la plupart à la main par les chercheurs d'or.

Jules a in problème avec les bretelles de son sac à dos, Bill lui donne tout le matériel pour le réparer.

Comme Jules bave devant les armes du magasin, Bill vient me demander si je suis d'accord pour que les enfants tirent au fusil. Nous installons des canettes de coca et nous faisons un concours à la 22 long rifle. Je connais cette arme car dans ma jeunesse, il n'était pas nécessaire d'avoir un permis pour la posséder car c'est un petit calibre. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. En tout cas, je suis rassuré qu'il ne tire pas avec une arme de guerre comme la M4 ou Jules s'est fait prendre en photo. Les enfants sont enchantés de faire un carton.


Comme Jules n'est jamais monté dans un Buggy, Carmela l'amène faire un tour dans la colline environnante. Il revient avec un sourire qui fait plaisir à voir après la journée misérable d'hier.

Bill a lu des tas de livre sur le Wyoming et connait toutes les histoires sur le coin. Il m'en raconte des dizaines et je me régale.

Par  exemple, une auberge rouge où le nombre de personnes empoisonnées par  la tenancière est inconnu. Toujours est il qu'on l'a attrapée et mise en cellule car on ne pendait pas les femmes à cette époque. Elle a été retrouvée décapitée dans sa cellule par un vengeur inconnu qu'on a jamais réussi à identifier.

Un français qui a creusé un canal tout au long des crêtes - y compris au dessus du B&B - pour amener l'eau à sa mine et qui a vendu l'eau à tous les mineurs au dessus desquels son installation passait. Le pauvre bougre a fini sa vie en prison en France car ses investisseurs français n'ont pas apprécié que sa mine ne produise pas suffisament d'or.

La journée passe à la vitesse de l'éclair en buvant des litres de limonades.
Nous retournons au saloon prendre un hamburger et il y a un monde fou.

Chris est toujours au comptoir avec un autre hiker et sa femme qu'il nous présente. Visiblement il a rencontré tout le village dans sa journée au saloon.

Nous retournons chez Bill où Carmela nous a fait une tarte à la cerise. C'est un délice ! Elle a vraiment du talent

Il faut aller se coucher car demain nous reprenons le trail. Nous avons tous rechargé les batteries aussi bien physiquement que mentalement surtout grâce à l'extrême gentillesse de nos hôtes.

25 août - Sospel > Menton

Il est 6h, l'heure des braves et de l'apparition du soleil. Je suis tellement proche d'eux que je réveille les squatteurs du jar...