lundi 25 juin 2018

25 Juin - Frisco

Le gel à fait son grand retour. Je pensais en être débarrassé pour l'été. J'aurai dû me douter de quelque chose car il n'y avait pas de moustiques hier soir alors que j'étais proche d'un point d'eau.

L'intérieur de la tente est couvert de givre. Le duvet est mouillé à l'extérieur. Retour aux pires moments des sommets du Colorado. Je n'ai pas eu froid de la nuit comme cela est le cas depuis que j'ai ma feuille d'insolant en Tyvek.

Néanmoins il faut bien sortir de la tente et je suis au milieu d'un champ de givre. La gelée blanche à tout saisi dans son grand manteau blanc. Je dois quand même déjeuner, et plutôt copieusement, pour digérer mes médicaments sans que les effets secondaires ne soient trop lourds.
Je n'ai trouvé que du porridge à Twin Lakes. Il faut être anglais pour inventer un déjeuner pareil. Quelle horreur !!! Mais je dois reconnaître que ça tient au corps. C'est ce qu'il faut pour les antibiotiques.

Hier je suis gentiment descendu tout l'après midi dans la vallée. Visiblement il va falloir ce matin payer l'addition de ce moment facile et remonter une autre vallée. Et pour grimper, ça grimpe sec et ceci dès les premiers pas qui m'envoient sur un sentier à flanc de falaise. Il fait un froid sibérien. Malgré mes gants, j'ai les doigts gelés. Les pieds souffrent énormément aussi. J'ai beau être dans un côte de compétition, je n'arrive pas à me réchauffer. Il faudra que j'attrape le soleil sur les hauteurs de la montée pour faire tomber le carcan de froid qui me tient prisonnier.

Le sentier suit la rivière qui se termine en bas en cascade auprès de laquelle j'ai campé. C'est un torrent bouillonnant du fait de l'importance de la pente. Il y a peu d'endroit où planter une tente et chaque emplacement est occupé. Je ne peux pas savoir s'il s'agit de hikers du CDT ou du CT (Colorado Trail). C'est le grand chassé croisé entre les 2 groupes et cela fait beaucoup de monde - enfin tout est relatif p/r aux Alpes - sur le même chemin.

Juste sous le 1er col, la vue se dégage enfin, la pente se radoucit un peu et le soleil fait pleinement son office. Tous les bonheurs d'un seul coup. Mais la montée a été raide et j'aurai souhaité un peu plus de douceur dans ce réveil de glace.


Le sentier croise le fameux cours d'eau, à cette hauteur plus petit et plus sage où un hiker s'est installé pour prendre son café. Steve, qui fait le CT dans le sens opposé au mien, a reconnu mon accent et me parle un français presque parfait malgré son accent. Il a passé un an à Paris il y a... 23 ans. Certains sont plus doués que d'autres pour les langues ! C'est la 2eme personne qui parle Français que je rencontre sur le Trail. Les Américains sont en principe totalement incultes des langues étrangères. C'est vrai qu'ils n'en ont pas besoin puisque tout le monde s'évertue à parler anglais. Et aucun habitant de ce pays ne s'étonne de savoir où vous avez bien pu apprendre à maîtriser leur langue. C'est tellement normal pour eux. L'avantage par contre et qu'il y a toujours eu des immigrants et qu'ils sont habitués à entendre leur langue massacrée. Au moins pas de complexe à essayer de communiquer !

J'arrive au Col Kokomo - quel nom bizarre - à 3664 m où je fais le malin en prenant une photo. Je me suis envoyé 700 m de dénivelé pour digérer mon porridge.


Je n'ai pas regardé où partait le chemin... Je dois rajouter 100 m de dénivelé pour atteindre un sommet. Visiblement celui là est moins célèbre car il n'y a pas de panneau. Mais la vue à 360 est vraiment très belle. Quel plaisir d'être sorti des arbres et de se placer au niveau des montagnes.


À partir de ce point se succédent montées et descentes dans une vallée bien exposée au vent. Je ne sais pas si le phénomène est dû à la présence de névés mais le vent est glacial. J'ai bien du mal à lutter contre le froid malgré un grand ciel bleu.
La succession rapide de montées descentes me fait du mal après la longue montée de ce matin. Ma respiration me pose des problèmes et la barre fait sa réapparition. Je prends de la Ventoline que m'a laissé Mathieu. Je repars comme neuf. Je me rassure en me disant que l'infection des sinus doit être à l'origine de ces problèmes respiratoires.

Je croise des hikers du CT. Je commence à maîtriser les salamalecs d'usage entre marcheurs. Au fameux "How are you doing today?" (Comment ça va aujourd'hui ?), on peut répondre "Fine" oú "Good" (bien), "Not Bad" (Pas mal), "Awesome" (top génial), "Can't complain" (je ne peux pas me plaindre)... Et enchaîner avec un "Have à good one" (Bonne journée), "Take care" (Prenez soin de vous), "Happy Trail" (Heureux Trail) "Enjoy your hike"...
Au moins on peut varier les combinaisons d'un hiker sur l'autre. Certains hikers m'arrêtent et me posent des tas de questions sur le Trail. Effectivement je monte vers le Nord et eux descendent vers le Sud. Ils veulent savoir dans quel état est le Trail. S'il y a de la neige, s'il y a des rivières à traverser, des endroits où dormir. Il s'agit principalement de personnes qui viennent de commencer et vont faire les 20 jours que prennent le CT. Je réponds bien volontiers à leur questions et les rassure sur l'absence totale de neige de cette année qui transforme le CT en promenade de santé - ou presque.

Au passage du dernier col, je tombe sur 2 cyclistes. Déjà bravo pour être montés jusque là même si je ne connais pas encore le sentier qu'ils ont suivi puisqu'ils dans le sens opposé au mien. Mais ce qui me fascine, c'est que l'un des 2 est monté en vélo de route ! C'est le 2eme que je croise. Comme le 1er était sur un Trail Head, donc un parking, je pensais que le gars avait fait autre chose que le Trail. Mais ici, aucune ambiguïté : le gars est montée au col par un sentier avec un vélo de route sans aucune suspension. Ça doit être un nouveau sport réservé aux poids ultra légers qui ne cassent pas les cadres !
Je le recroiserai 3 heures plus tard au bas de la montagne en train de descendre sur son vélo.

Pour l'instant il s'agit pour moi de redescendre. Encore une fois, une grande vallée me fait face avec en fond de magnifiques montagnes. Je distingue une rivière au creux de la vallée. Le sentier descend au dessous de la ligne des arbres et je vais retourner dans le tunnel vert.

Néanmoins l'après midi est agréable et coule doucement comme la rivière que je longe.
Vers 15h, j'entends un bruit d'une circulation automobile importante. J'approche de Copper Mountain une station de ski ouverte toute l'année grâce à ses multiples activités dont le vélo.

Il y a un système de bus gratuit dans la région qui relie les différentes villes. Mon idée est d'aller à Silverthorne et pour cela je dois passer d'abord par Frisco, Colorado - Ne pas confondre avec San Francisco qui se trouve en Californie.
À l'arrêt de bus, je tombe sur Claire et Mathieu qui attendent leur bus Greyhound pour Denver qui est en retard. Je ne m'attendais pas à les revoir. Ils me vendent la ville de Frisco et plus particulièrement un hôtel et un restaurant qu'ils ont beaucoup aimés. Je suis leurs conseils et décide de m'établir pour la nuit à Frisco.
L'hôtel est un bed and breakfast fort sympathique avec apéro offert - fromages et saucisson incluse. Le restaurant quant à lui est italien et est un des mieux côté de la ville. Comme je suis seul, je m'installe au comptoir et je fais rapidement connaissance avec Bill, mon voisin de chaise et avocat, avec qui je papote durant le repas. La soirée se finit avec le chef, d'origine italienne qui est un mordu de VTT. 

Comme entre temps j'ai réussi à faire ma lessive, il ne me restera qu'à ravitailler en nourriture pour repartir.

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