mercredi 9 mai 2018

9 Mai - El Mal Paìs

Ce matin petite marche pour se réveiller sur le bord de... l'autoroute. Une vraie en goudron avec des camions monstrueux qui m'arrachent mon chapeau à chaque fois qu'ils me croisent. 10 km d'échauffement, et c'est bien le cas de le dire car la nuit a été frigorifique. J'ai même dû mettre mes gants pour préparer le petit déjeuner.



Au bout des 10 km de purgatoire, sur une aire de repos, démarre le sentier des falaises. Quelle récompense ! Tout est magnifique. Les rochers sont orange et jaune parsemés de pins et de cyprès aux troncs torturés.

Les cactus sont en fleurs et elles sont d'un rouge écarlate. Par moment le sentier est composé de sable jaune qui fait ressortir les rochers. La vue maintenant. Tout simplement bluffant ! On embrasse toute la plaine. C'est "El Mal Paìs" composé uniquement de lave à perte de vue. Il y a des centaines d'hectares couverts de roche volcanique et ce sont les falaises qui ont stoppé la progression. Le plus étonnant est qu'il n'y a pas de volcans.

El Mal Paìs est recouvert de verdure. Principalement des pins qui sont les champions pour pousser sur rien. Le contraste entre le noir et le vert est saisissant de beauté.

"Le mauvais pays" détient son nom des conquistadors espagnols qui ne pouvaient pas traverser ce territoire avec leur chevaux. Les indiens quant à eux utilisaient des sentiers pour rejoindre les différents Pueblos.
Je mitraille de photos et je pourrais y passer des jours tellement c'est inspirant. Les chemins suit les falaises pendant 10 km pour amener à "La Ventana" (la fenêtre en espagnol), une arche impressionante par sa taille.


De toute façon, toutes les falaises le sont avec leur beauté à couper le souffle.
Je rate le chemin qui permet de descendre de la falaise pour aller voir"La Ventana" par en dessous. De ce que je vois sur le plan, je peux le rattraper plus loin, D'ailleurs voici 2 Cairns qui m'incite à descendre de la falaise. Quelle erreur ! Je suis dans un pente tellement raide que je ne peux bientôt plus remonter. Le poids de mon sac à dos m'entraîne et je manque plusieurs fois de dévisser. J'ai l'adrénaline dans le rouge et des branches me sauvent plusieurs fois la vie en me faisant de jolies écorchures. Je mets quasiment 30 minutes pour descendre 100 m de dénivelé. J'en suis bon pour une méga frayeur et un genou bien écorché.

Sur le parking qui permet aux touristes de venir photographier La Ventana, je retrouve les Thomas. Il ne me reconnaissent pas ce qui est normal vu leurs âges et le nombre de personnes qui passent chez eux. Monsieur me confie qu'il y a une cache d'eau plus loin. Je le savais mais c'est bon d'avoir la confirmation qu'elle est pourvue en eau.
Après la Ventana,  à nouveau un coup d'autoroute de 4 km. Je pensais les faire avant de déjeuner mais je tombe à court d'eau ce qui m'oblige à transvaser ma réserve. À avoir démonté le sac, j'en profite pour déjeuner alors que les camions continue leur pénible va et vient.

À 13h, j'arrive à la cache qui est aussi la birfucation du cdt à l'intérieur del Mal Paìs.
La cache est constitué de bouteilles d'eau de 500 ml. De l'eau en bouteille ! C'est la première cache qui est comme ça ! Je bois de l'eau destinée aux troupeaux depuis des semaines. Je trouve l'eau en bouteille délicieuse et je bois 1 l sur place avant d'embarquer 3 litres. Une étiquette m'informe qu'à la sortie, il y a une autre cache. Super !

J'entre dans El Mal Paìs et je tombe sous le charme. C'est vraiment très beau.
On voit tous les détails des coulées de lave. C'est donc très minéral et la vie qui tente de s'accrocher à chaque fissure force le respect.



C'est beau mais c'est inquiétant. L'homme n'est pas le bienvenu et ne peut pas survivre dans cet environnement. D'ailleurs la progression est extrêmement difficile car rien n'est plat. On ne peut pas utiliser ces bâtons qui se coincent dans les fissures et les trous des pierres ponces.
Heureusement que le passage est bien truffé de Cairns car c'est un vrai labyrinthe. On peut se perdre et tourner pendant des heures avant de trouver là sortie. La nature elle aussi est hostile. Je ressens une douleur très vive au petit doigt de pied. Croyant à une ampoule je déballe tout le matériel pour m'apercevoir que j'ai marché sur un cactus doit les épines ont traversé la semelle et percer mon doigt de pied.
Cela me permet de constater que mes 2 chaussures sont cuites. La semelle est coupée en 2 dans le sens de la largeur. Bravo Adidas Supernova, une sacrée cochonnerie à 140 EUR la paire. Et bravo à endurance shop à Marseille pour m'avoir si bien conseillé. Je sais que je n'ai pas ménagé mes chaussures mais mortes après 15 jours de Trail, c'est un record ! Je ne sais pas ce que je vais faire. Pour l'instant faire comme si de rien n'était.

En attendant, il faut traverser El Mal Paìs, dans une fournaise écrasante. En effet, les pierres noires renvoient la chaleur du soleil qui s'en donne à cœur joie.

L'air est extrêmement sec et je bois comme un trou.
Il fait tellement chaud que je m'attends à voir Lucifer en personne sortir d'une fissure et remettre la lave pétrifiée en marche !
Le physique commence à lâcher. Sans bâton, le sac se balance d'une bretelle à l'autre en fonction des sauts à chaque rocher. Le dos commence à être très douloureux. Le pire c'est que je ne peux pas rester ici. Il n'y a pas un seul endroit où mettre la tente et je n'ai quasiment plus d'eau. Une seule solution : serrer les dents et aller jusqu'à la cache d'eau à la sortie. D'après mes calculs, cela m'amènera à 19h et à 32 km. Il faudra bien que ça tienne ! Chaque pas me vrille le dos. Je regarde ma montre cent fois. En jouant sur le mental, je finis par sortir du jardin de Lucifer et je pense avoir fini ma journée. Mais impossible de trouver la cache d'eau. Le prochain point d'eau est une éolienne à 8 km. Pas le choix, il faut y aller et vite car il va faire nuit.
Sur le parcours, je croise un 4x4 dont les passagers sont des indiens en treillis et armés. Je comprends après coup qu'ils sont en train de chasser. D'ailleurs leur véhicule s'arrête. J'en profite pour courrir vers eux et leur demander s'ils ne savent pas où se trouve la cache d'eau. Ils n'ont jamais entendu parler de cache et encore moins du cdt mais il me donne 3 bouteilles d'eau, une banane et un coca. Ca me change la vie. Encore une fois je suis bluffé par la gentillesse de tous les gens que je croise car je n'ai rien demandé sauf une information.
Ils me confirment aussi qu'il y a une éolienne et de l'eau.
Ouf tout va bien, il n'y a plus qu'à finir la marche forcée mais une banane et un coca vont bien m'aider.
Je finis par arriver sur l'éolienne. L'endroit est paradisiaque. L'eau est limpide et il n'y a pas un animal. L'herbe est verte et la zone plate, ce qui en fait un lieu idéal pour planter ma tente. La cerise sur le gâteau, c'est qu'il y a 2 caisses marquées du sigle cdt remplies de bouteilles d'eau. Je ne sais pas si c'est la cache que je cherchais mais il y a une. Ce qui est bizarre c'est que le bassin déborde d'une eau chrystaline. Ils nous ont fait filtrer des eaux bien plus pourries sans qu'il y ait de cache !
Enfin ne boudons pas notre bonheur et profitons de ce joli coin et des ses commodités. Je crois qu'on l'a bien mérité après cette grosse journée de 39 km surtout avec les 15 km plutôt musclés de la traversée del Mal Paìs.
J'enchaîne les journées olympiques. Mais tant que ça tient, pourquoi arrêter ?

Le vent à légèrement forci et l'éolienne s'est mise à tourner. Dans mon duvet, j'entends le cliquetis de la roue à vent et l'eau qui coule dans le bassin. Cette jolie musique va gentiment me bercer même si je n'en ai pas vraiment besoin ;-)


7 commentaires:

  1. Félicitations pour la traversée du jardin de Lucifer ! C'est vrai que ça doit être bien aride comme lieu. Et la jolie couleur des roches ne doit pas aider ! Quand c'est dur tu les encore plus mon papa ! Bon courage !

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    1. Merci mon fils ! Heureusement que tu es là pour me soutenir :-) Je t'embrasse très fort.

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  3. Je te l'avais dit qu'à Marseille il n'y avait que des bras cassés... Mais il y a des pins aussi, et du coup, les addidas à 140 euros, ça doit aller pour faire Cassis/La Ciotat, et le gars a extrapolé. Bon courage !

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    1. Oui ça doit être pour aller de bar en bar pour boire le pastis ! Ceci étant dit, elles ont quand même traversées la rivière Gila un paquet de fois. Mais je suis le seul hiker avec un problème de ce style. Je suis allé acheter de la colle super forte... On verra bien, pas le choix :-(

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  4. Heureusement que tu nous décris aussi des petits coins de Paradis avec de l'eau claire...bon courage Laurent, et félicitations, des bises

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    1. J'espère que je ne fais pas un portrait trop négatif du Trail. Il est exigeant mais qu'est qu'il est beau. Mais effectivement il faut le mériter. Pourvu que je tienne jusqu'au bout !

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