vendredi 25 mai 2018

25 Mai - Zéro À Chama

Je pense que Chama est la plus petite des villes que nous avons croisées jusqu'à maintenant. Pour tout dire, il n'y a même pas de Mac Do :-) Cela n'empêche pas la ville d'être super étendue sur sa rue principale qui est aussi la route qui la traverse. Il y a plusieurs centres de vie, notamment autour de la gare mais tous les hikers de concentrent au Y Motel qui est l'hôtel le moins cher de la ville. D'ailleurs ce motel à mauvaise réputation car il est vraiment miteux. What you pay is what you get...

J'ai eu pitié de Mathieu qui devait potentiellement attendre plusieurs jours à Chama mon arrivée et j'ai choisi un motel plus confortable avec un peu de cachet. Il est tenu par un vieux couple qui devrait être à la retraite depuis des années et qui est un peu dépassé par la technologie. Ils n'ont pas réussi à lire le mail que je leur ai envoyé pour prendre soin de mes colis. Même la carte de crédit étrangère est un drame. Mais à côté de ça, le look de cowboy de Monsieur est impressionnant. Grand chapeau blanc, tout habillé de Jean avec un foulard autour du cou et une paire de bottes à faire pâlir John Wayne.

Car nous sommes toujours au Far west. Le saloon en face l'hôtel en fait foi et le port du chapeau de cowboy conseillé. Ce lieu devient mon endroit favori en ville car il me permet d'engloutir des quantités phénoménales de calories. Je me suis regardé dans la glace après ma douche hebdomadaire et j'ai pris peur. Je ne sais pas combien de kg j'ai perdu mais mon corps a puisé partout où il a trouvé de la graisse. Même mes bras ont maigri. Donc l'objectif en ville est de se gaver autant que possible et je vois bien que Mathieu se demande si je ne me suis pas transformé en boulimique maladif.

Bien évidemment, le zéro appelle ses obligations habituelles : lessive, courses au supermarché, réparation en tout genre y compris reprise de chaussette, accès Internet (celui de l'hôtel ne fonctionne pas) pour les mails et le blog...

Cette fois ci, j'ai décidé d'ajouter une nouveauté : descente chez le coiffeur, autrement dit chez le "Barber" font j'ai repéré l'échoppe hier soir.
Quand j'arrive, il y a un cowboy qui attend assis sur un fauteuil. Un vrai cowboy car il s'occupe de chevaux et enseigne même à l'Université. Pendant qu'il me parle, il enlève son chapeau qu'il fair glisser sur le bout de sa botte car il a croisé les jambes. Le geste est totalement maîtrisé et c'est vrai qu'il y a peu d'endroit où mettre son chapeau même si l'hygiène d'une botte est discutable.

Le salon du barber est comme au temps du western. Deux grands fauteuils qui s'inclinent dans tous les sens avec des reposes pieds plus larges que le fauteuil.
Le coiffeur est un papi d'une gentillesse extrême. En fait, le cowboy n'est pas un client et il est là pour discuter. En réalité, l'échoppe du barber est un autre lieu social où les gens s'arrêtent pour discuter.
Le barber est au téléphone et il a l'air de se prendre la tête avec un helpdesk quelconque, d'où ma conversation avec le cowboy qui m'apprend qu'il a des origines françaises. Mais il en a aussi d'Irlandaise et anglaise... Oui comme tous les Américains mais ça nous fait un sujet de conversation parce que mes connaissances équines sont très limitées.
Alors que j'attends, un indien, pardon un américain natif, demande s'il peut passer devant moi car il doit prendre la route pour aller à une fête. Mais bien sûr, je suis en journée de repos. Il demande à ce qu'on lui rase la tête sans toucher à la tresse qui pend dans son dos. Il le répète plusieurs fois d'un air très sérieux qui détonne avec son air jovial en entrant. Vidiblement on touche au domaine du sacré. La boule à zéro est vite exécutée et je prends place à mon tour sur le fauteuil. Je suis intimidé. Mon barber est un artiste et il fait virevolter mon fauteuil dans tous les sens. Ça monte, ça descend, à droite, à gauche, tout en changeant de ciseaux et sans cesser de parler. C'est un vétéran du Vietnam qui a aussi été en Europe à la fin de la guerre. Je n'arrive pas à savoir quel âge il peut avoir mais lui aussi devrait être à la retraite. On parle de l'Allemagne et de la France qu'il a traversé de long en large. On parle de vin et le cowboy m'annonce que le Nouveau Mexique se met à produire du vin comme l'a fait la Californie avant elle. Si ça continue, les ricains vont finir par nous botter les fesses avec leur pinard. Le dernier vin californien que j'ai bu était juste excellent et le Nouveau Mexique ne manque ni de soleil ni de terre disponible. La viande de bœuf ne doit pas rapporter tant que ça. D'ailleurs j'apprends que la viande que j'ai mangé au saloon provient d'un rancher de Chama. Et c'est vrai qu'elle était à tomber par terre !

Ma séance chez le barber s'achève et m'a rappelé le coiffeur de mon enfance. La boutique était toujours bondée et on y parlait principalement de foot, de pêche et de tous les ragots du village. Je ne disais jamais un mot parce qu'à cette époque les minots n'avaient pas la parole mais je n'en perdais pas une miette.
Je suis retombé en enfance version Western. Encore une magie du Trail.

Suite à la mise à jour de mon blog, j'ai reçu un commentaire avec une photo extraordinaire. Toute l'équipe Reservit du bureau qui tient un dessin de Némo. Pour tout dire, j'ai même écrasé une larme tellement j'étais ému. Touché en plein cœur le Némo. Cela ne pouvait pas me faire plus plaisir. Je vous embrasse tous du fond de mon âme de hiker.



6 commentaires:

  1. Salut Laurent,

    Chaussures neuves, vêtements propres et chaud pour attaquer la montagne, matelas réparé, coiffé et rasé de près (tu n'as pas mis de portrait cette fois...),quelques kilos de repris... il me semble que tu es prêt pour le Colorado.
    J'espère que tu profiteras mieux de ces prochains jours de marche car il m'a semblé que tu étais vraiment dans le dur ces derniers 8 jours ?

    Bon courage et beaucoup de plaisir.

    Ben.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci beaucoup Ben. Je te confirme que la dernière section du Nouveau Mexique à été difficile. Le matériel en fin de vie y a été pour beaucoup surtout que je me suis imposé le même rythme sans considérer le dénivelé. Le Colorado a bien calmé mes ardeurs et la neige a freiné le mouvement. En montagne, on ne peut camper n'importe où non plus. Quant aux kilos, ils sont partis avec l'effort et j'ai bien peur de continuer sur cette voie...

      Supprimer
  2. Magnifique attention qui a du te toucher droit au coeur! alors un bon anniversaire pour ton premier mois sur "ton" CDT, car nous avons bien senti au travers de nos lectures son caractère exclusif, même si tu n'es pas toujours seul, avec les hickers que tu croises et ces personnes attentionnées que tu rencontres, des magic people, qui semblent toujours être là au bon moment, c'est marrant. A nouveau nous t'envoyons un stock de pensées positives et souhaitons la bienvenue à Matthieu. grosses bises

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci Shiva. C'est vrai que j'ai beaucoup de chance de rencontrer les bonnes personnes au bon moment. Après je crois aussi que c'est une question d'attitude. Quand tu es cool, les gens sont cools avec toi. Tu reçois ce que tu donnes.
      Je sais que ça ne me ressemble pas, moi qui suis toujours stressé. Mais ici c'est Némo qui a pris le contrôle et qui est en charge des relations publiques. Et il est plutôt cool avec tout le monde ;-)
      Je vous embrasse tous les 2 bien fort et je te remercie du fond du cœur pour tous tes messages ! C'est vraiment génial d'avoir ces petites attentions qui m'attendent quand j'arrive en ville :-) À bientôt

      Supprimer
  3. Mon cher Laurent, que je te dise tout d'abord que je ne faisais pas partie des "fans" de ton aventure (peut-être une réaction de mère?) mais les commentaires très intéressants que tu communiques régulièrement m'ont peu à peu fait changer d'avis et maintenant je souhaite de tout coeur que tu arrives au but que tu t'es fixé (sans dommage !). N'oublie pas que de là-haut tu es accompagné. Affectueusement, Yette

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour Yette, Voilà un message qui me touche au plus haut point. Vraiment je vous remercie du fond du cœur. Je prends cet adoubement comme s'il provenait de mes propres parents. Je suis sûr que Maman en aurait tremblé chaque jour jusqu'à la fin et que Papa m'aurait traité de certains noms d'oiseaux d'aller me mettre dans un cirque pareil aux Amériques. Vous savoir en accord avec ma démarche me fait le même effet que s'ils me donnaient l'absolution. Vous savez, ils sont avec moi sur le Trail chaque jour qui passe. Ils me manquent et vous aussi que je n'ai pas vu depuis trop longtemps. Il faudra patienter encore quelques mois - j'espère - pour remédier à tout cela. Je vous embrasse très fort comme un fils pourrait le faire. À bientôt.

      Supprimer

25 août - Sospel > Menton

Il est 6h, l'heure des braves et de l'apparition du soleil. Je suis tellement proche d'eux que je réveille les squatteurs du jar...