J'ai laissé toutes les fenêtres ouvertes comme à mon habitude et la chambre est glaciale ce matin. Visiblement il a fait très froid cette nuit. Un signe avant coureur de l'hiver ? Je ne m'en suis pas rendu compte habitué comme je le suis à dormir sous la tente. D'ailleurs j'ai peu mais bien dormi grâce à cet environnement thermique familier.
A 6h30, je suis au restaurant pour mon petit déjeuner. Il y a un buffet "All you can eat" (tout ce que vous pouvez manger) qui fait le bonheur du hiker affamé que je suis. Pas sûr qu'ils fassent du profit avec mon estomac sans fond. De toute manière, ils se sont bien rattrapés par ailleurs. La serveuse sans âge qui me sert devrait être à la retraite depuis bien longtemps. La rapidité du service s'en ressent. Mais elle a sûrement besoin de ce travail pour survivre.
Je tente d'appeler à la maison mais la connexion internet est saturée. Le hall de l'hôtel, seul endroit où le wifi est disponible est plein à craquer de personnes qui tentent comme moi d'utiliser Internet avec leurs portables. C'est donc l'heure de pointe et la liaison satellite est incapable de supporter la charge. Tant pis je communiquerai avec la famille une autre fois. Il faut que je me mette en route.
Une fois mon sac bouclé, je fais mon checkout. Un employé qui identifie mon look inimitable de hiker du CDT m'informe qu'il y a un incendie à l'Ourdt et que le Trail devant moi est coupé. Ceci conforte mon idée de remonter au Nord pour rejoindre le raccourci de Butte.
Aujourd'hui je dois passer 2 frontières. La première, où plutôt la 2eme car la plus éloignée, est celle du parc Yellowstone. J'avoue que retrouver la liberté de dormir où je le souhaite m'enchante. A bas les permis !
L'autre frontière est celle du Wyoming avec le Montana. Je vais donc attaquer le dernier état à traverser. Même s'il reste plus de mille km à parcourir, je ne peux pas m'empêcher de penser à la fin du voyage. La prochaine frontière sera celle du Canada. C'est stupide mais ça me rend nostalgique. A la fois de la maison et du trail. Je vois que mes longues séances de méditation en marchant ne m'ont pas rendu plus cohérent. J'ai bien peur d'être toujours le même en profondeur ;-)
Mon sac bien pesant sur les épaules, une constante après chaque ravitaillement, je me mets en route. Mon Lodge de trouve juste devant le geyser "Old Faithful" qui a donné son nom à ce Disneyland géothermique. Justement une ranger donne des explications sur le phénomène. J'arrive au moment où elle donne l'heure de la prochaine éruption d'eau. C'est dans 45 minutes. Je n'ai pas la patience d'attendre juste pour faire une photo avec des centaines de personnes devant.
J'attaque le CDT. Celui-ci prend les chemins touristiques et me permet de voir la majorité des geysers. Il y en a de toutes les formes et de toutes les couleurs.
Le site est exceptionnel et mère nature a vraiment gâté Yellowstone. Dommage que les marchands du temple soient venus gâcher un si beau spectacle.
A cette heure matinale, les touristes sont très rares et je profite allègrement du site.
Je photographie plus que de raison et l'heure tourne. Lorsque je rejoins l'axe principal, les touristes arrivent par cars entiers. Il s'agit principalement de chinois. Tourisme de masse. Ils se comportent comme des touristes non éduqués, comme devaient l'être les Français dans les années 70 en débarquant en Espagne. Ils parlent forts, bousculent les autres touristes, se mettent devant pour prendre des photos, ne respectent pas les interdictions de s'approcher au risque de dégrader les geysers... Je pense que cela ira mieux dans quelques années lorsqu'ils auront pris l'habitude de voyager.
En attendant, je fuis ce cirque à grande enjambées pour retrouver ma solitude et la nature préservée.
C'est d'ailleurs très étonnant et de faire quelques mètres et de quitter une foule compacte et bigarrée pour se retrouver seul dans la nature. Aucun touriste ne s'aventure en dehors du site. Tant mieux pour moi.
Il est vrai que le sentier n'engage pas à la promenade bucolique car il grimpe sec pour atteindre un plateau. Il est aussi au milieu des arbres ce qui bloque tout accès à la vue.
Malgré la végétation, l'environnement est très sec et tous les ruisseaux sont vides. Celui que je visais pour manger à midi l'est lui aussi. Le prochain point d'eau est le lac Summit à 8 km. Je ne pensais plus tomber sur de problèmes d'eau mais il va falloir que je me remette dans le bain ("et je remets 100 francs dans le nourrain" - blague que les moins de 40 ans ne peuvent pas comprendre).
Je mange avec l'eau dont je dispose. J'arrive au Lac et je m'aperçois que le prochain point d'eau est à 16 km.
Il est 14h et je vais devoir emporter l'eau pour le "dry camp" de ce soir. Autant dire que j'alourdis mon sac déjà trop lourd de 3 kg. Je fais la grimace en le soulevant. L'après midi va être très longue...
Après le lac, l'environnement devient dantesque. Tout a brûlé et les seuls arbres encore debout sont carbonisés sur pied. Les cours d'eau et les lacs sont complètement à sec.
On dirait une scène post apocalyptique de guerre nucléaire. Je ne sais pas pourquoi mais je me mets à penser aux nouvelles "Les chroniques martiennes" de Ray Bradbury. Je m'attends juste à ce que les fantômes des indiens viennent tirer les pieds de l'astronaute que je suis.
Le décor redevient plus "humain" avec de petits pins qui poussent pour remplacer ceux à terre. Le soleil est totalement voilé par une nuage de fumée. Effectivement l'incendie est très important et me rappelle celui que nous avons connu au Colorado.
Je touche ma première frontière. Je passe en Idaho/Montana.
En fait le CDT suit la frontière entre l'Idaho et le Montana. S'il traverse entièrement le Montana, il ne va jamais s'enfoncer en Idaho.
Je n'ai personne avec qui boire un whisky et je décide de trinquer à la santé de Kettle et de Hercules que je ne reverrai sans doute jamais. Dommage, ils étaient vraiment gentils ces 2 là. Comme il est 17h30, l'heure est tout à fait convenable pour boire un coup et me fait bien moins mal que la fois avec Kettle à 10h30 du matin.
Il me reste 4 km pour franchir la 2 ème frontière et sortir du parc. La zone est très mal entretenue. Je pense que ni les marcheurs - hors CDT - ni les rangers ne viennent jamais par ici. Voir un décor dévasté présente peu d'intérêt. D'après mes notes, le feu date de 1988. La forêt a du mal en s'en remettre.
A 18h30 et d'après mon GPS, j'ai franchi la limite du parc. Autant à l'entrée il y avait des panneaux, autant ici il n'y a aucune indication. J'en fait mes 31 km en ayant démarré à 9h. J'ai porté mon eau tout l'après midi. Bref je décide de planter la tente sans délai.
C'est uniquement lorsque j'ai fini de la monter que je m'aperçois que j'ai oublié un critère qui est celui d'avoir un arbre pour prendre la nourriture. Il n'y en a pas car je suis entouré de jeunes pousses de sapin bien vigoureuses mais peu élevés en hauteur. Hors de question de recommencer l'expérience de la nourriture dans la tente. J'accroche alors mes sacs à 1 m du sol. Au pire l'ours se gavera sur mon compte mais sans s'occuper de moi. On verra le résultat demain...
A 6h30, je suis au restaurant pour mon petit déjeuner. Il y a un buffet "All you can eat" (tout ce que vous pouvez manger) qui fait le bonheur du hiker affamé que je suis. Pas sûr qu'ils fassent du profit avec mon estomac sans fond. De toute manière, ils se sont bien rattrapés par ailleurs. La serveuse sans âge qui me sert devrait être à la retraite depuis bien longtemps. La rapidité du service s'en ressent. Mais elle a sûrement besoin de ce travail pour survivre.
Je tente d'appeler à la maison mais la connexion internet est saturée. Le hall de l'hôtel, seul endroit où le wifi est disponible est plein à craquer de personnes qui tentent comme moi d'utiliser Internet avec leurs portables. C'est donc l'heure de pointe et la liaison satellite est incapable de supporter la charge. Tant pis je communiquerai avec la famille une autre fois. Il faut que je me mette en route.
Une fois mon sac bouclé, je fais mon checkout. Un employé qui identifie mon look inimitable de hiker du CDT m'informe qu'il y a un incendie à l'Ourdt et que le Trail devant moi est coupé. Ceci conforte mon idée de remonter au Nord pour rejoindre le raccourci de Butte.
Aujourd'hui je dois passer 2 frontières. La première, où plutôt la 2eme car la plus éloignée, est celle du parc Yellowstone. J'avoue que retrouver la liberté de dormir où je le souhaite m'enchante. A bas les permis !
L'autre frontière est celle du Wyoming avec le Montana. Je vais donc attaquer le dernier état à traverser. Même s'il reste plus de mille km à parcourir, je ne peux pas m'empêcher de penser à la fin du voyage. La prochaine frontière sera celle du Canada. C'est stupide mais ça me rend nostalgique. A la fois de la maison et du trail. Je vois que mes longues séances de méditation en marchant ne m'ont pas rendu plus cohérent. J'ai bien peur d'être toujours le même en profondeur ;-)
Mon sac bien pesant sur les épaules, une constante après chaque ravitaillement, je me mets en route. Mon Lodge de trouve juste devant le geyser "Old Faithful" qui a donné son nom à ce Disneyland géothermique. Justement une ranger donne des explications sur le phénomène. J'arrive au moment où elle donne l'heure de la prochaine éruption d'eau. C'est dans 45 minutes. Je n'ai pas la patience d'attendre juste pour faire une photo avec des centaines de personnes devant.
Oui je sais, il n'est pas en éruption...
J'attaque le CDT. Celui-ci prend les chemins touristiques et me permet de voir la majorité des geysers. Il y en a de toutes les formes et de toutes les couleurs.
A cette heure matinale, les touristes sont très rares et je profite allègrement du site.
Je photographie plus que de raison et l'heure tourne. Lorsque je rejoins l'axe principal, les touristes arrivent par cars entiers. Il s'agit principalement de chinois. Tourisme de masse. Ils se comportent comme des touristes non éduqués, comme devaient l'être les Français dans les années 70 en débarquant en Espagne. Ils parlent forts, bousculent les autres touristes, se mettent devant pour prendre des photos, ne respectent pas les interdictions de s'approcher au risque de dégrader les geysers... Je pense que cela ira mieux dans quelques années lorsqu'ils auront pris l'habitude de voyager.
En attendant, je fuis ce cirque à grande enjambées pour retrouver ma solitude et la nature préservée.
C'est d'ailleurs très étonnant et de faire quelques mètres et de quitter une foule compacte et bigarrée pour se retrouver seul dans la nature. Aucun touriste ne s'aventure en dehors du site. Tant mieux pour moi.
Il est vrai que le sentier n'engage pas à la promenade bucolique car il grimpe sec pour atteindre un plateau. Il est aussi au milieu des arbres ce qui bloque tout accès à la vue.
La porte de l'enfer ?
Malgré la végétation, l'environnement est très sec et tous les ruisseaux sont vides. Celui que je visais pour manger à midi l'est lui aussi. Le prochain point d'eau est le lac Summit à 8 km. Je ne pensais plus tomber sur de problèmes d'eau mais il va falloir que je me remette dans le bain ("et je remets 100 francs dans le nourrain" - blague que les moins de 40 ans ne peuvent pas comprendre).
Je mange avec l'eau dont je dispose. J'arrive au Lac et je m'aperçois que le prochain point d'eau est à 16 km.
Il est 14h et je vais devoir emporter l'eau pour le "dry camp" de ce soir. Autant dire que j'alourdis mon sac déjà trop lourd de 3 kg. Je fais la grimace en le soulevant. L'après midi va être très longue...
Après le lac, l'environnement devient dantesque. Tout a brûlé et les seuls arbres encore debout sont carbonisés sur pied. Les cours d'eau et les lacs sont complètement à sec.
On dirait une scène post apocalyptique de guerre nucléaire. Je ne sais pas pourquoi mais je me mets à penser aux nouvelles "Les chroniques martiennes" de Ray Bradbury. Je m'attends juste à ce que les fantômes des indiens viennent tirer les pieds de l'astronaute que je suis.
Le décor redevient plus "humain" avec de petits pins qui poussent pour remplacer ceux à terre. Le soleil est totalement voilé par une nuage de fumée. Effectivement l'incendie est très important et me rappelle celui que nous avons connu au Colorado.
Je touche ma première frontière. Je passe en Idaho/Montana.
En fait le CDT suit la frontière entre l'Idaho et le Montana. S'il traverse entièrement le Montana, il ne va jamais s'enfoncer en Idaho.
Je n'ai personne avec qui boire un whisky et je décide de trinquer à la santé de Kettle et de Hercules que je ne reverrai sans doute jamais. Dommage, ils étaient vraiment gentils ces 2 là. Comme il est 17h30, l'heure est tout à fait convenable pour boire un coup et me fait bien moins mal que la fois avec Kettle à 10h30 du matin.
Il me reste 4 km pour franchir la 2 ème frontière et sortir du parc. La zone est très mal entretenue. Je pense que ni les marcheurs - hors CDT - ni les rangers ne viennent jamais par ici. Voir un décor dévasté présente peu d'intérêt. D'après mes notes, le feu date de 1988. La forêt a du mal en s'en remettre.
A 18h30 et d'après mon GPS, j'ai franchi la limite du parc. Autant à l'entrée il y avait des panneaux, autant ici il n'y a aucune indication. J'en fait mes 31 km en ayant démarré à 9h. J'ai porté mon eau tout l'après midi. Bref je décide de planter la tente sans délai.
C'est uniquement lorsque j'ai fini de la monter que je m'aperçois que j'ai oublié un critère qui est celui d'avoir un arbre pour prendre la nourriture. Il n'y en a pas car je suis entouré de jeunes pousses de sapin bien vigoureuses mais peu élevés en hauteur. Hors de question de recommencer l'expérience de la nourriture dans la tente. J'accroche alors mes sacs à 1 m du sol. Au pire l'ours se gavera sur mon compte mais sans s'occuper de moi. On verra le résultat demain...
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