vendredi 10 août 2018

10 Août - Ok Corral

J'ai fait la grasse matinée jusqu'à 6h. Je crois que je n'avais pas assez dormi lors de mon séjour à Dubois. C'est habituel quand je dors dans un lit au lieu de ma tente. Mais avec la séparation, le phénomène a été amplifié.

Alors que je finis de boucler mon sac, une Sobo me surprend. Je ne l'ai pas entendue venir. Quelques échanges polis et la voilà repartie. Elle est la seule hiker que je verrai de la journée.

Mon objectif est de faire 30 km. Il y en a 78 pour atteindre la frontière de Yellowstone. Avec les 20 d'hier, la dernière journée d'approche sera à 28 km.

J'attaque le Trail et ses vallons au milieu des arbres. La visibilité est très limitée aux trous dans la végétation. Pas mon environnement favori...

Rapidement je me retrouve à devoir traverser une rivière. Elle est très large et le courant est fort. Aucun passage à sec.

Visiblement les chevaux sont à l'honneur mais pas les piétons. J'ai droit à un bain de pieds matinal version antarctique. L'eau est tellement froide qu'elle fait mal aux pieds. Je sors le plus vite possible. Avec un séchage en marchant, la puanteur des chaussures est sur sa courbe ascendante.

Le Trail me mène dans une forêt qui a brûlé il y a des années. Les arbres ont été calcinés sur pied et se sont des centaines de chandelles noires à perte de vue.
Bien triste spectacle même si la végétation en dessous est luxuriante. Il y a beaucoup de plantes mais peu de nouveaux arbres. Ce sont des centaines d'hectares qui ont brûlé, à tel point qu'à midi je décide de déjeuner dans la forêt calcinée dont je ne vois pas la fin. Il fait très chaud et l'ombre des troncs noircis offre peu de fraîcheur.

Je repars rapidement pour changer d'environnement. Je suis toujours dans les vallons. Je croise un groupe de cavaliers, tous en T-shirt et casquette de baseball mais tous armés de revolvers. Je me m'y fait pas à cette banalisation des armes.

Je débouche sur une immense plaine. C'est ici que se trouve la fameuse "Horse Highway".

Je ne comprenais pas bien ce que voulait dire le hiker croisé hier. En fait il y a 4 lignes de circulation bien établi comme sur les autoroutes. C'est bien trouvé de la part du hiker rencontré hier car j'ai tout de suite identifié le lieu. En aucun cas, ce ne peut être le nom officiel de l'endroit :-) Au niveau circulation, c'est bien plus calme qu'à Los Angeles.

A peine, j'emprunte l'autoroute qu'une caravane de chevaux arrive face à moi. L'homme de tête porte une tenue de camouflage militaire et un chapeau de cowboy. Il y a au moins 10 chevaux et mules bâtés avec des caisses. Sur l'une d'entre elle, des cornes de cervidés ont été attachées. En queue de convoi, un jeune homme en T-shirt et casquette bleus. Je les salue et poursuis mon chemin.

Un cavalier seul arrive rapidement du fond de la vallée. Je le vois de loin grâce à son T-shirt rouge.

Quand il arrive à mon niveau, il stoppe sa monture. C'est assez inhabituel pour que je l'examine de près. Mise à part son t-shirt, tout le reste de ses vêtements est conforme à l'attirail du parfait cowboy : jean protégé par des jambières de cuir, bottes, large chapeau et revolver dans son étui à la hanche... Il est jeune et porte une barbe touffue.
Après les salutations d'usage vite écourtées, il me demande si j'ai vu passer des cavaliers. La question m'étonne profondément. Un peu comme si  on me demandait si j'ai vu des bateaux dans un port. Je le regarde encore plus minutieusement et je vois qu'il a la main sur la crosse de son pistolet alors qu'il me parle. Je me doute que c'est purement machinal mais du haut de son cheval et avec sa tenue, mon esprit fait un bon de 150 ans en arrière et je me vois au temps du Far West. J'hésite à lui demander s'il y a une prime à la clé. Je lui décris les 2 derniers groupe de cavaliers. Seul le dernier l'intéresse et il me demande si le cavalier de tête était sur un gros cheval bai. Je suis encore plus dans un western que je le pensais. Comme s'il ne pouvait être autrement que je connaisse les chevaux et la couleur de leur robe. Il me demande alors dans quelle direction ils sont partis tout en jetant des regards derrière lui. Je lui indique la direction tout en m'attendant à voir arriver devant moi la troupe du shérif au galop. Sûrement qu'ils sont en train de traquer un voleur de chevaux ;-)
Mon chasseur de prime semble hésiter entre faire demi-tour ou partir dans la direction que je lui ai indiquée. Il jette encore un regard derrière lui et se décide pour aller chasser seul le renégat.

Je reprends le Trail encore tout à la magie d'être plongé dans "Ok Corral". Je m'attends à entendre des coups de feu d'un instant à l'autre quand je vois un nouvel équipage arriver face à moi. Je suppose qu'il s'agit de ce que scrutait le chasseur de prime avant de s'élancer.

Il s'agit de 2 cowboys, eux aussi en tenue western. Le premier est à cheval et tire derrière lui une mule batée avec des caisses. Le second est à pied et tente de suivre tant bien que mal la cadence du cheval du premier. J'avoue que le couple est étonnant. Ils me font plus penser à Don Quichotte et Sancho Penza version Western qu'au terrible shérif qui poursuit sa proie. En tout cas, le fait qu'un cowboy se ballade à pied me laisse penser qu'il y a bien un problème de cheval dans cette histoire. Lorsque le cowboy piéton saute le ruisseau qui traverse le trail, j'ai bien le temps de voir l'habituel pistolet dans son étui et sa ceinture de balles avant qu'il ne remette sa chemise dessus.

A mon salut, le cavalier me répond "I'm doing ok" d'une voix énervée. Visiblement il y a un problème mais je n'en saurai pas plus. Mais j'ai de quoi me faire un film dans ma tête pour la suite. Ça va m'occuper dans cette plaine qui n'en finit plus.

Il est déjà plus de 17h et je vois des endroits parfaits pour un campement. Terrain plat, cours d'eau, zone ensoleillée avec des bosquets d'arbres...

Je me laisserai bien tenter mais un contrat est un contrat. Je dois faire 30 km. Je suis fatigué et le dernier km est vraiment très frustrant car je quitte la plaine pour partir dans un vallon encaissé et une nouvelle forêt brûlée. Déprimant...

Je pousse jusqu'au prochain cours d'eau car j'ai décidé de me laver. Je suis couvert de poussière. Merci les chevaux.
Alors que je n'ai cessé de traverser de magnifiques cours d'eau dans la plaine, je n'ai droit qu'à de maigres filets d'eau dans la montagne.

Au 3eme point d'eau, comme il y a un terrain plat et qu'il commence sérieusement à se faire tard, je décide de m'arrêter. Je me lave, fais ma lessive, plante la tente, mange un morceau... Et il fait déjà nuit. Je ne peux plus trouver un arbre adéquat pour accrocher ma nourriture. Je sais que je suis en territoire Grizzly mais je n'ai pas d'autre choix que de dormir avec ma nourriture dans la tente. Si je la laisse dehors à même le sol, les rongeurs vont s'en occuper.

Je me couche mais je ne suis pas rassuré. Comme d'habitude, il y a du passage dehors mais contrairement à hier je reste aux aguets. J'ai ma bombe anti ours à portée de main mais j'ai peu d'illusions. Le temps de sortir le bras du duvet, de mettre la main sur la bombe et de l'utiliser, l'attaque sera finie depuis bien longtemps. Je vais mal dormir cette nuit...

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