Ce matin mon état général me rappelle pourquoi il est bien plus facile de voyager seul. Je vais à ma cadence sans m'inquiéter du rythme des autres. Au menu 1500 m de montée dont les 900 premiers en moins de 4 km sur les 19 km total de la journée. Avec ma grosse journée d'hier, la combinaison est loin d'être gagnante. Je vais donc lentement en ce début de journée. Je croise un couple de trentenaire qui s'est arrêtée dans la côte pour souffler un peu. Eux aussi trouvent que ça grimpe sec et ils ont décidé de faire une pause. Pas mon style et même si je ralentis le rythme je ne m'arrête jamais.
En fait je suis un besogneux à défaut d'avoir de la force physique ou du talent.
En réalité, je crois que c'est pour ça que je réussis. Je suis un gros bourrin qui cogne dans le mur jusqu'à ce qu'il tombe. J'envie les génies et les athlètes qui ont du succès naturellement. Pour ma part c'est beaucoup d'énergie à donner.
La température est la même qu'hier et avec l'humidité étouffante, je sue sang et eau (enfin surtout de l'eau). La montée se fait au milieu des grands sapins qui ne permettent pas de voir bien loin. Il y a juste la crête qui est une grande prairie où les taons s'en donnent à cœur joie. En dessous de 2000 m nous sommes bien dans les montagnes à vache et les insectes qui vont avec.
D'ailleurs le sentier me fait passer dans une ferme d'altitude. Le couple de vachers et leur fille s'empressent de rentrer dans le bâtiment alors que j'arrive. C'est à ce type d'attitude que je comprends que le GR5 est trop fréquenté. Ils doivent avoir leur dose des touristes et de leurs questions débiles sur leur troupeau qui paisse dans les prés aux alentours.
J'atteins bientôt le col en dessous du Mont des Mattes à 1900 m. Il faut maintenant redescendre au fond de la vallée. Je croise toute une colonie d'enfants Hollandais et chacun me dit bonjour. Je réponds à tous et je crois que jamais je n'ai dit autant de fois bonjour à la suite. Ils sont rigolos avec leur casquette identiques et leurs joues rouge tomate. C'est aussi méchant à la montée qu'à la descente.
Au bas de la pente coule une rivière, lieu idéal pour le pique-nique du midi. Je n'ai pas très faim. Sûrement l'effort de la veille couplé à celui de ce matin. Mais si je ne mets pas d'essence dans le moteur, je suis bon pour caler dans la montée qui m'attend. Je mange du bout des lèvres et repars rapidement. J'ai encore plus de mal que ce matin. Heureusement un couple aux cheveux grisonnants arrivent derrière moi. Voila une motivation. Je décide de ne pas me laisser doubler et Monsieur decide de me rattraper. Idéal pour oublier ses petites misères que de jouer avec l'esprit de compétition. Un peu débile aussi mais on ne peut pas lutter contre sa propre bêtise.
C'est à nouveau couvert de transpiration que j'arrive au col. Mais je dois encore descendre avant de passer un 3eme col : celui de Bassachaux à 1778 m. Une légère descente et il faut a nouveau faire le forcing pour gravir les 300 derniers mètres.
L'arrivée de fait sur le parking d'un bar restaurant où les touristes profitent de la vue. Le contraste entre mon état de délabrement et celui du chauffeur qui sort de sa voiture climatisée est hilarant.
Je ne peux m'empêcher de prendre un coca bien mérité facturée à la sauce touriste de passage. Il faut bien que tout le monde profite...
Il me reste encore 1h30 pour atteindre le refuge de Chésery et le lac Vert tout à côté. Le trajet pour s'y rendre est étonnant. Les télésièges de la station tournent à plein régime et amènent des hordes de vétetistes de descente. Ils déboulent à pleine vitesse sur des pistes spécialement aménagées. Il y a un monde fou. Je ne m'attendais pas à ça si une section qui se termine à un refuge.
Après le col de Chésery à 1992 m, voici le refuge qui se dessine en contrebas. Un immense drapeau suisse m'indique que je viens de traverser la frontière. J'y retrouve l'accent qui vient avec auprès des gardiennes. Je pensais m'installer près du lac Vert en contrebas mais ses rivages ne le permettent pas. On m'indique les emplacements de bivouac où sont installés 5 autres tentes. Le refuge est plein à craquer et il me sera même impossible de manger car toutes les places à table sont prises. Il paraît que c'est le même délire depuis la mi juin. Ça me fait un peu peur pour la suite surtout sur lez sections communes avec le Tour du Mont Blanc.
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