Je me dis que ce n'est pas bien grave puisque je vais encore passer la journée sous la pluie et que tout va finir trempé.
Ce matin au petit déjeuner de la chambre d'hôtes, je retrouve les 2 hikers avec qui j'ai discuté au restaurant hier soir. Il s'agit d'un italien de Milan et d'un californien qui vit à Berlin. Un couple qui s'est formé au détour du chemin. Ça arrive très souvent. Rares sont les hikers qui marchent seuls et des groupes se forment et se défont au fil des kilomètres. Je fais un peu exception à la règle même si je sympathise facilement devant une bière avec les marcheurs que je croise. Par contre, une fois sur le trail, je préfère être seul avec moi même. C'est déjà beaucoup à supporter !
J'ai ravitaillé pour les 5 jours à venir. Ce soir je dors à Roncevaux mais derrière il n'y a plus de ville. Ceci veut dire 5 kg qui s'ajoute au poids du sac à dos. Je les sens bien en me collant mon sac sur les épaules. Mon hôtesse m'explique qu'autant de pluie est anormale en juillet et qu'elle commence en avoir marre. Et moi donc !
Il suffit de passer la porte pour retrouver l'ambiance humide de ces derniers 2 jours. Le village est encaissé, ce qui demande à passer une falaise pour en sortir. Je suis donc très rapidement dans le rythme entre la pluie et la grimpette de compétition. En 10 minutes, je suis trempé de la tête au pied. Et au cas où j'ai encore un champ de fougères à traverser. Je préférerais éviter de revivre la journée d'hier. Un peu s'est bien mais beaucoup ça serait trop...
En fait ça n'arrête pas de grimper. Je sais qu'il y a plus de 1300 m à monter et visiblement nous allons les faire tout de suite d'affilée. J'en suis à mon 4eme jour et je fais de petites journées. Le physique suit bien. J'arrive quand même bien entamé au sommet complètement noyé dans les nuages. Il y seulement les hénissements des chevaux en liberté pour se moquer de ma piètre performance. Je les entends mais j'ai du mal à les voir dans le brouillard qui m'entoure.
En fait, je vais rester toute la journée dans le brouillard. Ceci veut aussi dire que je n'aurai pas une seule minute d'accalmie et que seule l'intensité de la pluie va varier.
Je vois au loin mes 2 compères de ce matin qui prennent la première route goudronnée que l'on croise au lieu de rester sur le chemin. C'est vrai qu'il est boueux à souhait et qu'avec le peu de visibilité c'est un vrai challenge de trouver sa voie. Mais je déteste trop la route pour suivre leur exemple. Je suis dans un bois avec un sentier de crête qui va de palombière en palombière. Vu que les cabanes sont bien visibles, perchées en haut des arbres avec de grandes échelles pour y accéder, je suppose que le parcours est évident par temps clair. Pour ma part, il faut que je sois à 5 mètres pour voir une palombière. Donc aucune chance de voir la suivante...
Je fais donc de la navigation au GPS sachant que ce capricieux appareil est souvent désorienté par les nuages qui empêchent une bonne réception des satellites. On peut dire qu'il n'est pas vraiment précis dans la purée de pois dans laquelle nous naviguons. Comme un bonheur n'arrive jamais, les batteries me lâchent. J'ai changé de modèle de GPS l'année dernière et ce Garmin a d'énormes problèmes de consommation. J'ai heureusement mon téléphone en secours que je vais devoir utiliser pour la HRP. Ça ne remplit pas de joie parce qu'il est bien moins précis que mon GPS et que je ne peux pas enregistrer mon tracé (très utile pour faire demi tour quand on se perd).
La journée est donc un peu difficile mais mon vrai problème va être de manger. En effet lutter contre le froid, trempé de la tête au pied en cherchant des repéres invisibles consomme beaucoup d'énergie. Je ne tiendrai pas la journée. Et si je m'arrête, je vais geler sur place. J'ai de l'eau qui coule le long des bras et j'essore ma chemise quand je presse les manches. J'ai l'impression d'être tombé dans une rivière.
Je pousse donc la machine mais sans GPS je ne sais pas exactement combien il me reste de km. Mis à part, 2 ou 3 erreurs dans grosses conséquences, j'ai gardé un bon rythme. De toute façon, je patauge dans la boue, donc pas moyen de s'arrêter mais je redoute le moment où il faudra le faire.
Le destin me donne un coup de pouce car le sentier que je suis arrive sur une route goudronnée. Elle est parallèle à mon tracé et m'amène directement au col oú je dois aller. Dans le piteux état dans lequel je suis, je ne vais pas jouer les puristes pour 500 m. Je reste donc sur le goudron. J'arrive facilement au col et la dernière palombière se trouve donc au niveau du sol puisqu'il n'y a pas d'arbres. Je me réfugie dans cet abri de fortune qui me protége de la pluie et du vent. Je peux donc me rassasier dans des conditions décentes. Je me sens tout de suite mieux.
Je repars le cœur vaillant sous des trombes d'eau et tombe bientôt sur un panneau qui m'indique que Roncevaux se trouve à seulement 6 km. Une partie de rigolades surtout que le chemin officiel reste sur la route où je suis tombé par hasard.
Je croise une nationale et après l'avoir traversé je me retrouve sur une portion du Camino de Santiago. Ce HRP est plein de surprises. Je retrouve donc les signes que j'ai suivi pendant des 100aines de km. Ça me touche vraiment.
Par contre, je ne suis jamais passé par le Camino Francès sur lequel je me trouve. Il n'a rien de naturel. Il est couvert d'une couche de gravier gris, un aménagement humain significatif de la surfréquentation du chemin. J'avais retrouvé ce même aménagement lors de notre arrivée à Santiago lorsque le Camino del Norte avait rejoint le Camino Francès. Je pensais que cette horreur était réservée aux derniers km mais j'en arrive à penser que l'intégralité du Camino est aménagée de la sorte. Au moins, j'arrête de patauger dans la boue mais ce gravier artificiel me choque. Il n'a rien à faire là.
Bientôt j'entrevois l'immense bâtiment de la collégiale de Roncevaux.
Pour moi ça veut dire prendre une bonne douche chaude et mettre des vêtements secs. Que Dieu en soit remercié !
Je vins de lire quelques pages de ton blog et ne comprenais pas tout, jusqu'au moment où j'ai constaté que je le lisais à l'envers, je vais recommencer depuis le début 😕
RépondreSupprimerAlors t'as retrouvé le bon sens ? 😂
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