J'ai dormi comme une masse. Inigo m'a dit 20 fois hier soir que j'avais l'air fatigué. Il est très observateur ce garçon.
Il est 7h quand je me réveille et je suis frais et dispo. Je décide de prendre mon temps. Si j'avais pu avoir une chambre, je serai peut être resté pour prendre un jour de repos. Mais le destin en a décidé autrement. De plus la météo a changé. La pluie est décalée et ne devrait tomber que cette nuit ce qui nous laisse la journée pour marcher. Donc je repars sur le chemin mais doucement.
Je m'occupe néanmoins de reconditionner mes achats de la vieille en complétant ce qui me reste. Je m'aperçois tout de suite du drame. J'ai acheté pour 10 jours de bouffe. Je me retrouve avec 5 boîtes de thon, 6 soupes, 500 g de miel...
J'ai du mal à fermer mon sac et même à le soulever pour me le coller sur le dos. Il doit faire dans les 20 kg. J'enrage sur ma propre bêtise.
Inigo est parti depuis longtemps lorsque je me décide à enfin quitter le camping. Il est 10h et je dois retourner sur Parzan pour récupérer le GR 11 qu'emprunte aujourd'hui le HRP. Ceci veut dire 5 km de route goudronnée car le GR 11 est à 1 km au Nord de Parzan. Je m'inflige la même punition qu'hier et mange du goudron à qui mieux mieux comme apéritif de la journée.
J'ai 1600 m de dénivelé à monter et 1000 à descendre sur 25 km. L'avantage est que le GR est plus facile que la HRP. Ça reste quand même une grosse journée. En fait je ne sais pas quelle journée n'est pas grosse sur la HRP.
Mes premiers pas me donnent tout de suite l'ambiance. Le poids de mon sac tire à outrance sur mon dos et les bretelles me cisaillent les épaules. Je connais bien cette sensation pour l'avoir souvent vécu sur le CDT. Le poids du ravitaillement. Mais je consomme un kilo de nourriture par jour. Je vais donc taper allègrement dans le stock pour le faire rapidement diminuer. Surtout qu'il y a des refuges partout et que je pourrais les utiliser pour manger en cas de pénurie. Pour l'instant, j'en suis bien loin.
En attendant, je dois rejoindre le GR par la route. Je calcule que je vais commencer ma journée à 11h30. J'ai vraiment bien fait de le prendre cool ce matin. Félicitations Nemo le poisson clown. En plus la météo était claire : beau temps le matin, couvert l'après-midi et pluie dans la nuit. Je viens de gâcher la partie beau temps avec une séance uniquement au goudron. J'enrage et je veux en finir au plus vite avec la route. Mais je n'ai pas fait 1 km que je tombe sur un tunnel interdit aux piétons. Normal cette interdiction car il n'y a pas de visibilité et surtout pas de trottoir ou de bas côté. C'est injouable sans y laisser sa peau. Hier soir, le taxi est passé dans le tunnel sans que j'en fasse cas mais aujourd'hui c'est un obstacle infranchissable pour le piéton que je suis redevenu. Le pire c'est que j'ai beau regarder la carte, il n'y a pas d'autre route pour aller à Parzan. Quoiqu'en y regardant de plus près, il semble y avoir un sentier qui contourne le tunnel. Et c'est bien le cas, il s'agit de l'ancienne route avant que le tunnel soit réalisé. Elle me sauve la vie.
C'est transpirant de la tête au pied que je rejoins Parzan puis le GR 11. Malgré le mon sac au poids d'un âne mort, la rage m'a fait enchaîner les kilomètres à fond sans desserrer les dents.
Si ce n'était le poids de mon sac, la journée serait facile. Le GR utilise un chemin carrossable en gravier gris pour arriver comme une fleur sous le sommet. La pente est douce et ce chemin se suit sur 11 km et permet de faire facilement 1000 m de dénivelé. Pour moi, ce passage à la portée de tous reste une épreuve. Chaque pas me coûte une énergie folle. J'arrive néanmoins à doubler un couple. Il s'agit d'un père et de sa fille. Visiblement celle ci n'a pas vraiment envie d'aller à la montagne et traîne des pieds comme si elle était épuisée. Le père résigné attend patiemment la fin de la crise de sa fille. Je reconnais son visage fermé et son regard de braise pour l'avoir déjà vu chez d'autres dans des conditions similaires (spécial dédicace pour Serge).
Le final pour le sommet se fait dans un bon pierrier des familles qui me laisse des traces. Maintenant reste la descente. Elle aussi présente peu de difficultés si ce n'est par sa longueur. Néanmoins le cadre est beaucoup plus joli qu'à la montée surtout que face à moi se dresse le 2eme plus haut sommet des Pyrénées, le Pico de Posets à 3375 m.
A 18h30, je suis à 1 km du refuge de Viados, objectif de l'étape du jour.
Néanmoins je longe un magnifique torrent et je vois des spots magnifiques où planter ma tente. Même si je sais qu'il y a des zones de bivouac autour du refuge, je n'ai aucune envie d'aller me coller avec les marcheurs du GR 11. J'ai de la bouffe à revendre et une envie de bivouac sauvage en solitaire. Tant pis pour Inigo que je devais retrouver ce soir mais l'envie est trop forte. Je me trouve un endroit de rêve près du torrent et le temps de monter la tente la pluie commence à tomber.
Il faut toujours écouter ses envies...
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