mercredi 28 juillet 2021

Benasque

Il a plu toute la nuit sans interruption. J'ai dormi comme une masse. Mon sommeil a néanmoins été interrompu par le claquement du tonnerre. Le bruit s'est répercuté sur les flancs de la montagne et m'a réveillé par son intensité. Vraiment inquiètant. J'ai compté les secondes entre la lumière de l'éclair et le bruit du tonnerre. 7 secondes donc les éclairs tombent à 7 km. En tout cas c'est ce qu'on me disait quand j'étais petit. Dernièrement quelqu'un m'a dit que c'était n'importe quoi. Mais bon je suis rassuré et je me rendors.

A 7h, je me réveille naturellement. J'entends des gouttes tomber sur la toile de ma tente mais après vérification ce ne sont que les arbres qui s'égouttent. Le ciel s'est bien vidé mais les nuages sont toujours là. D'après la dernière météo que j'ai prise à Parzan, la journée sera couverte mais sans pluie.

Je plie mes affaires et reprends la route. Je commence par rejoindre le refuge de Viados, objectif d'hier.
Aujourd'hui, il y a 2 options. Soit le HRP très technique avec 2 cols à passer en mode course d'orientation soit le GR11. Le guide précise que le HRP ne doit être pris que si les conditions climatiques sont optimales. Vu la pluie de la nuit et les nuages noir au dessus de ma tête, on va éviter le drame. Ça sera donc le GR 11. Donc au programme 1130 m de dénivelé à grimper et 1650 à dégringoler. Une grosse montée suivi d'une grosse descente. La journée d'hier se répète mais je démarre à une heure raisonnable.

Le GR commence par se traîner à flanc de vallée. On monte, on descend mais on entame pas vraiment une grosse grimpette. C'est une différence notable avec le HRP qui vous envoie directement sur les crêtes sans hésiter.

Autre différence, le GR est très bien signalé et il n'y a pas à jouer les explorateurs comme sur le HRP. C'est vraiment reposant après des jours à deviner les cols à passer.

Contrairement à ce que je pouvais penser il y a peu de monde sur le GR. Peut être que je ne suis pas à l'heure de pointe. Les gens partent plus tôt ou plus tard. Je ne sais pas mais je suis content d'être seul. Il y a quand même quelques espagnols que je croise. Je rappelle que le GR 11 est en Espagne et que son équivalent en France est le GR 10. Donc c'est un sentier espagnol pratiqué par les Espagnols. Je reste toujours estomaqué par cette non mixité.

Les nuages continuent s'enrouler autour des montagnes. Ils jouent les magiciens en cachant un sommet puis en découvrant un autre. Ça bouge dans tous les sens. Certaines montagnes ressemblent à de grosses marmites d'où s'élèvent de grands volutes blancs de leur ventre. Certains sommets se prennent pour des volcans.


Tout cela est bien bucolique mais la réalité de la pente se rappelle à moi. Les 500 m de dénivelé finaux sont particulièrement raides. Le sentier est une boue noire glissante fait de poussière des roches de la même couleur qui m'entourent. La pluie de cette nuit ne m'aide vraiment pas et tout est glissant. J'ai physiquement du mal et c'est moralement long. Un espagnol avec un petit sac à dos me rattrape. Entre un mélange de français, d'espagnol et d'anglais nous essayons de nous parler. C'est pathétique. Il fait le GR 11 et ne comprend pas quand je lui parle du HRP visiblement inconnu en Espagne. Je finis par lui dire que je fais le GR11. Il est content de me mettre dans une case qu'il maîtrise et se détend. Pour certains, c'est important que chaque personne soit dans une case bien connue. Je ne vais pas le contrarier.

Nous arrivons ensemble au col. Il y fait un froid glacial entre les nuages noirs qui cachent le soleil et le vent. Après avoir forcés comme des ânes pour atteindre cet objectif nous ne rêvons plus que de le quitter au plus vite. L'homme est un être plein de contradictions.
 


Bien sûr, le début de la descente est aussi raide que la montée et la boue noire est toujours là. Je commence à avoir sacrément faim mais aucun endroit pour faire ma dînette. Surtout il n'y a pas d'eau de ce côté ci de la montagne. Je finis par trouver une zone protégée dans un torrent à sec et me fais un ramen avec ma réserve d'eau. J'ai eu du mal à trouver une source ce matin. Les eaux des torrents et rivières sont toutes boueuses, d'une couleur marron peu ragoûtante, à cause de l'eau de ruissellement de la pluie.

Après avoir mangé je retrouve des forces pour continuer la descente. Je trouve même une source lorsque la pente se réduit. 

Je suis maintenant à flanc de collines dans une forêt luxuriante. Il y a des fleurs bleues, blanches, roses, violettes. Beaucoup d'arbres et de buissons. Plus question de quitter le sentier qui représente l'unique passage possible dans cette jungle. Je suppose que cette montagne est particulièrement arrosée pour être aussi verdoyante.


Cela change vraiment des pierriers de hautes altitudes. Je passe un refuge où je récupère de l'eau. Lorsque qu'il fait soleil et donc chaud je consomme 5 litres par jour. Aujourd'hui avec les nuages et le froid, je ne dépasserai pas les 3 litres.

Il est 16h et cela fait plus de 3h que je descends. Je commence sérieusement à fatiguer. Alors qu'habituellement je fais plus que la section officielle, aujourd'hui je vais la respecter et m'arrêter au camping de Benasque. Inigo que je joins par WhatsApp est parti dans la forêt. Il a bien raison mais je n'ai plus assez d'énergie pour continuer.
 

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