dimanche 11 juillet 2021

Buen Camino

"Buen Camino !" C'est ce que m'a crié le premier cycliste que j'ai croisé en sortant de la gare d'Hendaye. Je n'avais plus entendu cette expression depuis Saint Jacques de Compostelle.
Je l'ai pourtant entendu des centaines de fois en faisant ce chemin. Ça m'a ceuilli sans prévenir et une miriade de souvenirs sont remontés à la surface. J'ai souri comme un demeuré en marchant jusqu'à l'hôtel. Ça ne va pas aider à l'image des marcheurs.

C'est vrai que Bertrand et moi étions déjà venu à Hendaye depuis Saint Jean Pied de port par le GR 10 pour rattraper le Camino del Norte. Je suis donc en terrain connu et je vais faire un bout de ce même chemin pour rattraper le HRP.

Le voyage a été éprouvant. 9h de TER un samedi de départ en vacances reste une épreuve. Les enfants qui pleurent, les valises par dizaines, les places vendues en double... J'ai même eu droit à l'intervention des démineurs dans mon wagon. Une mamie a flippé devant un bagage qu'un gars avait laissé pour aller fumer dans les toilettes. Résultats : 161 € (on appréciera la précision des 1 € de l'administration ferroviaire) pour le fumeur appelé au haut parleur qui est sorti en trombe des toilettes avec sa clope à la main. 20 minutes de retard pour tous les autres.

Hendaye ne ressemble pas du tout à une ville de la côte d'Azur. Ici pas de bling bling mais une station balnéaire familiale ou se mélange français, espagnols et basques. Les locaux parlent les 3 langues et ça fait un sacré Meli mélo dans la rue.


A noter que les basques ne sont pas stressés. 1 heure d'attente pour un burger au food truck dans le parc derrière l'hôtel. Mais bon tout le monde avait sa bière basque à la main pour discuter avec de grands gestes en attendant. Pas mauvaise la bière. Malheureusement je ne parle pas le basque et j'ai trouvé le temps un peu long. Peut être que le fait d'avoir les crocs a joué.

Bref à 23h je me suis écroulé dans mon lit... Pour être réveillé à 2h du mat par un scooter qui avait laissé son pot d'échappement à la maison. J'ai compté les moutons le reste de la nuit en pensant meurtres de conducteurs de 2 roues.
A 6h n'en pouvant plus, je prépare mon sac et me fait mon petit déjeuner des champions au porridge.

Le soleil vient de se lever et je longe l'Atantique avant de lui tourner le dos. A cette heure on croise des joggers insomniaques et des fêtards avec des yeux en trous de mites. Je me lance sur la HRP depuis la plage en regardant les surfeurs qui eux aussi se sont mis à l'électrique ! Vraiment tout y passe.


Je sais qu'il va falloir sortir de la ville et que le tarif est de manger du goudron. Je prends mon mal en patience et après être passé sous l'autoroute grâce à un tunnel pour les piétons, j'attaque la montée vers les montagnes. Parce que même si c'est la fin des Pyrénées (ou le début je ne sais pas dans quel sens on doit le prendre), le GR nous met tout de suite dans l'ambiance. Je dis nous car je commence à doubler des randonneurs. Il fut dire qu'on est Dimanche et que le sport national, après la pelote basque, reste de se promener. Il y a quand même des marcheurs au long cours avec des sacs à dos énormes. Visiblement l'ultra ligth est moins populaire qu'en Amérique du Nord.

D'ailleurs le fait d'être en France change vraiment la donne sur ce voyage. Le fait de jouer à domicile lève la partie "exotique" que j'apprécie tant. Ça change aussi le niveau du challenge car c'est vraiment facile d'abandonner. Il suffit juste d'aller à la première gare pour rentrer à la maison. C'est autre chose quand on se trouve à l'autre bout du monde. Cette idée me fait très peur. C'est si facile d'être lâche...

A midi après une méchante côte, j'arrive pile sur un restaurant. Il est pris d'assaut et il reste juste une petite table pour que je puisse prendre un coca. Je ne sais pas dans quel pays je suis mais la serveuse me parle espagnol. Je dois être en Espagne. Autant que je m'habitue à ça parce que je ne vais pas arrêter de passer d'un pays à l'autre. Heureusement que je n'ai pas de test PCR à faire à chaque fois. Je serai bon pour une greffe du nez.

Alors que je pourrai déjeuner, je n'ai pas faim. C'est souvent comme ça que nos corps réagissent face à un effort violent. La fameuse faim du marcheur viendra plus tard et plus rien ne pourra la rassasier. Pour l'instant j'abandonne ma table que se dispute 3  touristes français pour reprendre la route. Le village est bondé de touristes. Il est constitué uniquement de supermarché de cigarettes, d'alcool et de fringues. Tout est affiché en Français. Visiblement les taxes sont moins importantes en Espagne. Les bidochons se disputent les places de parking pendant que je pars en courant.

A la sortie du village, je quitte le GR 10 pour le tracé de la HRP. Plus aucun signe et je navigue au GPS. Il n'y a d'ailleurs plus grand monde mis à part des trailers qui courent sur les sentiers (respect parce que les côtes sont vraiment raides).

Une baisse de régime m'indique qu'il faut mettre un peu de carburant dans le moteur ce qu'une tranche de saucisson et un peu de couscous règlent facilement. Je repars rapidement car je veux continuer tant que je le peux.

A 15h je m'aperçois que je me suis envoyé les 25 km et 1500 m de dénivelé de la 1er étape. L'arrivée est un hôtel restaurant et je me dis que transpirant et puant comme je suis, une douche ne sera pas de refus. Malheureusement l'établissement semble définitivement fermé. Peut être un effet du Covid. En tout cas me voilà dans la mouise parce qu'il n'y a aucun terrain plat autour de moi pour planter ma tente. J'embarque donc 4 litres d'eau pour me faire un dry camping dès que je trouve un spot. Dommage pour le lavage !

Alors que je repars, arrivent 3 jeunes germaniques (allemands, autrichiens, suisses allemands... I don't know). Ils ont la 20aine et ils sont bourrés de coups de soleil.  Bref pas mieux que mes fils qui ne mettent jamais de crème solaire et qui rougissent à qui mieux mieux. Jeunes de tous les pays d'Europe donnez vous la main. Bien sûr ils avancent comme des sauvages. Privilège de l'âge.

Ça fait maintenant 5 kms que je marche sans avoir trouvé le moindre endroit pour un bivouac. Nous sommes dans des vallons encaissés et les pentes sont impressionnantes. Pas question de planter une tente. J'ai même essayé de m'approcher de quelques bâtisses perdues dans la montagne. En fait il s'agit d'abri ou les chevaux viennent dormir. L'intérieur est infesté de crottins et de taons. L'extérieur ne vaut pas mieux et est vraiment en pente. Je commence à le demander combien de kilomètres je vais devoir marcher pour trouver un endroit décent. Quand soudain au détour d'un virage, un petit parking avec une chambre d'hôtes et un restaurant.

Mon karma doit être pas si mauvais que ça car il reste une seule chambre de disponible qu'on s'empresse de me préparer au plus vite. Une douche et une bière plus tard c'est un homme neuf qui espère passer une bonne nuit. 


La météo annonce 4 jours de pluie consécutives. Je vais profiter de ma soirée pour trouver des points de chute. Pas question de passer en mode galère dès le début surtout si je peux l'éviter !

4 commentaires:

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    1. Salut Grégoire,
      Merci de tes vœux mais comme tu le sais si bien c'est toujours un grand plaisir de traverser des montagnes. Ce ne sont pas les Alpes et je ne finirai à Menton mais ça sera quand même la Méditerranée (j'espère). Bonnes vacances à toi.

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  2. Nemo a traqué sa chemise bleue ciel pour une à carreaux ! Tiens la barbe commence à pousser ! Merci pour ces récits 💕

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    1. Je me suis dit qu'un peu de fantaisie avec le carreauté changerait un peu de ce bleu uni qu'on a bien trop vu. Et oui je vais encore finir en vieux robineux à barbe blanche ;-)

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25 août - Sospel > Menton

Il est 6h, l'heure des braves et de l'apparition du soleil. Je suis tellement proche d'eux que je réveille les squatteurs du jar...