Ce matin pas un souffle d'air. Je sors la tête de la tente et le ciel est bleu sans un nuage. Enfin une belle journée qui s'annonce !
Elle est néanmoins chargée car le HRP m'a amené au milieu de nulle part et que j'imagine bien que je vais devoir mettre tous mes sens en alerte pour trouver mon chemin. Sans compter que passer 3 cols en une journée reste une épreuve. J'ai bien dormi et je suis concentré sur l'objectif.
Premier objectif et le plus difficile de la journée, le col de la Cornella à 2485 m. Et on rentre tout de suite dans le vif du sujet en grimpant le long de la cascade sous laquelle j'ai dormi. Il y a quelques Cairns mais le sentier reste très confidentiel. Peu de passages pour marquer le sentier. Il existe encore des endroits secrets dans les Pyrénées.
Ce côté confidentiel se complique une fois arrivée sur le plateau. Il y un lac et le seul axe de sortie semble le ruisseau qui alimente le lac. Je m'y engage. Heureusement il y a des myrtilles pour m'encourager ;-)
A la sortie de la deuxième montée se trouve un autre pallier qui est un immense pierrier. Bien évidemment comment penser y échapper... Dans ces conditions plus question de vague sentier, il faut se fier au Cairns. Et quand on les cherche soit il y en a trop soit il n'y en a pas. J'ai quand même repéré la voie de sortie et je la grimpe au milieu des rochers et des grandes touffes d'herbe. Vu l'inclinaison, j'ai des réminiscences du Tuc d'avant hier. Je passe cette montée douloureuse pour tomber sur un 4eme cirque. C'est ça que j'appelle un col. Chaque fois que je pense arriver au but, il y a un nouvel objectif. L'inclinaison est très importante et j'ai du mal à trouver des appuis. Je traverse en Zig Zag en essayant de ne pas décrocher sur cette espèce des gravier compact.
Voici maintenant le pierrier sommital pour couronner l'œuvre. J'entends du bruit derrière moi et je vois un hiker. Nous arrivons ensemble au sommet. Un allemand pas très causant voire antipathique qui marche à toute vapeur. Hike your how hike. Il s'engage dans la descente en me disant qu'on va bien voir la profondeur de la descente.
Effectivement c'est la fameuse descente raide et glissante que je ne voulais pas passer sous la pluie.
En fait de raide on devrait dire verticale. Le moindre faux pas et c'est l'effet toboggan jusqu'en bas. Alors qu'Helmut (oui j'ai décidé qu'il s'appelait comme ça) descend façon panzer division, je décide que la vie vaut encore le coup d'être vécue. J'y vais tout doux. Helmut est un point à l'horizon alors que je viens tout juste de finir. Vraiment méchante cette pente. Elle mérite sa renommée.
Le col suivant "Coll de Curios" à 2455 m ne présente aucune difficulté. Il permet d'avoir une belle vue sur les lacs environnants. D'ailleurs je m'arrête pour déjeuner sous le col auprès d'un magnifique lac. Je vois Helmut dans la montée au dessus de moi. A priori, il s'arrêtera de s'acharner une fois arrivé à Berlin. Je ne pense pas qu'il a pris le temps de regarder les paysages.
Pour l'instant le physique tient. Une fois requinqué par mon habituel ramen, je passe le col et m'attaque au dernier. Même niveau de difficulté que le précédent. C'est juste l'accumulation des 3 qui commence à peser sur la carcasse.
Je passe donc le dernier col, le 'Coll de Calberante" à 2610m, et j'en ai le souffle coupé. La vue est absolument superbe. Il s'agit d'une succession de lacs immenses qui se déversent les uns dans les autres et alimentés par des cascades.
Les lacs sont nichés au sein de magnifique plaques de granit rose polies par les glaciers qui couvraient autrefois toute la zone.
Mon pouvoir de contemplation est toujours intact. Néanmoins il faut reprendre la route et descendre en marchant sur le granit rose. Et c'est là où les choses se compliquent. On ne peut pas passer n'importe où à cause de la hauteur des plaques. Il s'agit d'un immense labyrinthe où il faut trouver sa voie. Certains passages sont carrément dangereux et demande à faire de la varape. Je perds un temps fou à faire des allers retours au milieu du granit. Mais ça reste un endroit magique qui mérite le voyage.
Lorsque j'arrive enfin à sortir du cirque, je suis complètement vidé. Je suis inquiet car il n'est que 16h. Je commence à broyer du noir et à me dire que je ne tiens plus la distance. La descente et les sauts m'ont bousillé les genoux et les chevilles. Je me demande si je ne dois pas prendre un jour de repos de plus...
A ce sujet, je dois quitter le HRP pour aller ravitailler dans le village de Tabascan où il y a une épicerie. Cela fait un détour de 10 km. Comme je ne voulais pas trainer 8 jours de nourriture, j'ai coupé en 2 avec arrêt à Tabascan. Je n'ai fait que 8 km aujourd'hui (d'où mes pensées noires sur mes capacités) et je ne vois pas comment en caser 10 de plus en fin d'après midi.
Je regarde mes notes et décide d'aller me mettre sur le dernier lieu où il est possible de mettre une tente. Toute la zone est terriblement encaissée, le sentier étroit avec des arbres partout.
A 18h, j'arrive sur le lieu en question. Très beau avec son énorme cascade. Mais même si la pente est moins forte, elle n'en reste pas moins une pente. Il y a des bouses de vaches partout. Je ne me vois pas passer la nuit ici. Trop inconfortable.
Je décide donc de repartir sachant qu'à partir de maintenant il n'est plus sensé y avoir de zone possible pour planter une tente. Et ça se confirme rapidement. Les pentes sont tellement abruptes que c'est injouable. Par contre je commence à croiser des randonneurs à la journée. Des gens avec des chiens, une personne avec un bras dans le plâtre... Ces personnes n'ont pas fait 10 km pour être ici. Une lueur d'espoir pointe en moi.
Effectivement je tombe sur une route carrossable où sont garées des voitures. Des gens sont d'ailleurs en train d'embarquer. Je les aborde avec mon espagnol de pacotille en leur demandant combien de km pour Tabascan. Je connais parfaitement la réponse (7 km) mais j'espère mendier une place dans la voiture.
La dame m'explique alors qu'il y a un camping à 3 km et qu'il sera plus simple d'aller à Tabascan demain. Quelle bonne idée ! J'avais peur d'arriver à 20h30 dans un village sans être sûr de trouver une chambre dans un hôtel.
Puis un camping veut dire douche chaude, lessive, bière, repas et recharge batterie/téléphone pour les 5 jours à venir.
Je mets ce plan en exécution et me voilà descendant le chemin carrossable puis la route en goudron. Je m'inquiète de l'heure tardive mais on vit tard en Espagne.
Mon arrivée au camping ne pose aucun problème. Il y aura même beaucoup de randonneurs qui arriveront après moi. La fille du patron parle Français ce qui le facilite la vie. Il y a même le Wifi même s'il n'y a pas de réseau téléphonique.
Bref je m'installe au plus près à côté d'une bande de jeunes qui jouent de la guitare. Je prends une douche (quel bonheur l'eau chaude !), lave les affaires (avec assouplisseur) et mange le menu du camping en buvant ma bière. Du bonheur à l'état pur. A 22h je tombe comme une masse. Pas la force d'écrire mon blog. Je suis quand même satisfait d'avoir réussi à m'approcher à 4 km de Tabascan. Je suis prêt à repartir pour la nouvelle section de 5 jours. Juste à ravitailler demain...
Nemo tu me fais rire, tu doutes de tes capacités et tu n’arrêtes pas d’empiéter sur les itinéraires du lendemain. 😂
RépondreSupprimerC'est vrai mais j'empiète de moins en moins sur les itinéraires du lendemain. Au début j'ai gagné 2 jours mais je les ai reperdu depuis longtemps et maintenant je suis juste le programme. C'est là que je vois que j'ai vieilli ;-) Non sum qualis eram
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