dimanche 8 août 2021

Collada dels Meners

Le vent s'est levé durant la nuit. J'étais donc rassuré que le brouillard allait disparaître emporté par les rafales qui soufflaient violemment. C'était bien le cas quand j'ai passé la tête hors de la tente. Par contre, il y a une grosse barre de nuages noirs qui me fait face.
Ma zone de camping que je découvre avec le départ du brouillard.


Je me dépêche donc de faire mon sac avant que le ciel ne me tombe sur la tête. Je ne suis pas très rassuré quand je me mets en marche et me dis que je vais encore passer la journée sous la pluie malgré une météo contraire. J'ai déjà les pieds complètement trempé par l'herbe arrosée par le brouillard.

D'ailleurs face à moi il y a une mer de nuages bloquée dans la vallée. C'est ce que j'appelle être pris en sandwich. La première partie de la journée est de descendre dans la vallée et donc dans la purée de pois. Le chemin n'est même pas marqué et je suis un vague sentier que je distingue grâce à l'herbe piétinée. Pas de cairns, pas de marque. Une fois les nuages de la vallée sur moi ou s'il pleut, je vais me perdre...


La descente est très raide et mes genoux me rappellent qu'il y en a marre de multiplier les exploits physiques quotidiennement. Entre la météo et mon physique, j'ai le moral qui tombe dans les chaussettes. Je me dis que le HRP est pas fait pour moi, que je joue au jeune mais que je suis trop vieux. Qu'il faut vraiment que j'arrête ces bêtises... 

C'est vraiment bizarre cet ascenseur émotionnel que l'on vit sur le trail. Dans la même journée on passe du rire aux larmes, de la joie de vivre à la dépression. A chaque fois, on y croit dur comme fer. Mais la joie comme la peine sont trop intenses pour ne pas être éphémères. Je crois que c'est l'effort physique violent et constant qui produit de l'endorphine qui joue sur les émotions. C'est peut être ça qu'on aime tant...

En tout cas pour l'instant je brois du noir. Et la descente est terrible. Je suis maintenant suffisamment bas pour être dans les nuages. Tout est détrempé et terriblement glissant. Il faut suivre des ruisseaux qui représentent le sentier. C'est dur. Je finis par trouver des marques jaunes qui me facilitent bien la tâche. Le chemin est beaucoup plus large aussi. Je sors mon téléphone/GPS pour savoir pendant combien de temps je vais descendre pour m'apercevoir avec horreur que je suis le mauvais sentier. Les marques jaunes ne sont pas celles que je dois suivre. Mon chemin n'a pas de marque. Demi tour et je remonte tout ce que j'ai descendu pour rien. Ma cocotte minute interne siffle comme une locomotive (je crois aussi qu'elle jure). A l'intersection, le chemin est à peine visible et je comprends mieux comment je l'ai raté. J'essaye de le suivre et me perds dans le brouillard. Je suis trempé par les hautes herbes. J'en ai vraiment marre.

Je remets ma casquette de Sherlock Holmes et je retrouve le chemin. Je le suis et fini par arriver sur le chemin carrossable que je dois remonter. Au moins j'ai fini de jouer les Indiana Jones pour le moment.

Déjà ça fait du bien de marcher sur du plat. Ensuite les nuages se retirent en un clin d'œil. En fait, je suis à la limite de la mer de nuages qui fluctue de quelques centaines de mètres en permanence. 


En tout cas, comme je monte, je vais la laisser derrière moi. J'ai une superbe vision en profondeur vers le col que je dois passer. Je dois monter 600 m de dénivelé pour aller à Port du Rat qui va me faire passer en Andorre.

J'attaque la montée et je sens que tout s'est mis en place. L'ascenseur part dans l'autre sens et je me régale. Je ne donnerai ma place pour rien au monde. Je suis bien au milieu d'un paysage superbe en train de passer à nouveau un col. Quand je dis que ces revirements du tout au tout n'ont aucun sens... Et je n'ai aucun contrôle sur cet effet girouette. Il faut profiter de tout ce qui passe, le bien comme le moins bien. C'est la particularité du voyage au long cours.

Le col du Rat me fait découvrir Andorre. J'avoue que c'est un choc. Alors que je viens de laisser une vallée sauvage, je tombe directement sur un domaine skiable. Je descends aux pieds des pistes et en profite pour manger un morceau à côté d'un ruisseau.

Je repars pour m'apercevoir que la station est ouverte et que le télésiège fonctionne. Il y a énormément de monde. Normal c'est encore Dimanche. J'ai l'impression que tout le monde me regarde lorsque j'arrive sur les bâtiments. Il est vrai que mon look de clochard ne s'arrange pas avec les jours qui passent. Je détonne un peu au milieu des T-shirts criards, des shorts trop courts et des tongs 

Je m'enfuis donc vers mon destin de randonneur solitaire. M'enfuir est un bien grand mot car je me joins plutôt à la foule qui grimpe vers le lac au dessus du restaurant de la station. Je fais la queue pour pouvoir y accéder. Dès que je le peux j'accélère pour retrouver ma tranquillité. 


En final, le GR que je suis est en contrebas de la route qui mène à la station. Ce n'est pas grave mon MP3 couvre le bruit des moteurs.

Le GR nous amène à l'entrée d'un parc qu'il traverse. Il est bien indiqué à l'entrée que le camping est strictement interdit. Voilà qui n'arrange pas mes affaires. Il y a un refuge au milieu du parc mais je ne compte pas m'y arrêter. Le parc est carrément aménagé pour les enfants avec des parcours initiatiques sur la nature et des zones de jeux. Il y a énormément de monde. Je pensais jouer à cache cache avec ma tente mais ce n'est pas possible. De fil en aiguille j'arrive au refuge. Il est situé sur un zone plate qui fait vraiment défaut dans ces montagnes encaissées.

Je regarde les notes et il y a une zone où mettre sa tente à 4 km avec 400 m de dénivelé. Le problème est qu'il est 17h et que j'en ai plein les pattes. Mais c'est ça ou le refuge. Je décide donc de repartir. J'ai beaucoup de mal à démarrer et je sais que je vais finir tard. Le moral et le physique ne m'aident pas du tout pour mon nouvel objectif du jour. Mais je leur laisse pas le choix. Un pas après l'autre comme d'habitude...

Je dépasse une cabane toute mignonne dans sa prairie au bord d'une rivière. Voilà la solution. Je vais dormir dans une cabane. Malheureusement quand j'arrive elle est déjà occupé par un HRPiste. Dommage, j'aurai pu avoir une nouvelle expérience sur ce voyage car je n'ai jamais dormi dans une cabane et celle ci était particulièrement bien aménagé avec lit et table. Souvent il ne s'agit que d'un simple sol en terre battue.

Je repars donc dans ma galère et je grimpe alors qu'un vent démentiel se lève. Les éléments se liguent contre moi. A force de grimper j'arrive sous le col  "Collada dels Meners" à 2713 m. On y trouve souvent des zones plates juste avant la grimpette finale. C'est bien le cas ici et un ruisseau coule en son milieu.

J'installe mon campement sans savoir si je suis ou pas encore dans le parc. On verra bien. Mais à l'heure ou je finis et celle à laquelle je vais commencer demain, je ne risque pas grand chose.
Beau paysage. Dommage qu'il y fasse si froid.

Le vent est vraiment un cauchemar. Autant pour monter la tente que pour me laver. D'ailleurs il fait chuter la température à tel point que je mange dans la tente. J'ai les doigts gelés. J'ai mis tous les vêtements chauds sur moi mais je n'arrive pas à me réchauffer.
La nuit risque d'être douloureusement froide si le vent ne se calme pas...

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