Ma journée va être très compliquée. Mon idée est de retourner sur le CDT mais pas là où je l'ai quitté à Copper Mountain, la station de ski. Ça serait trop simple. Je veux partir dans l'Est pour faire 3 sommets : Edward à 4218 m, le Grays à 4252 m et le Torreys à 4351 m. Les 3 sont côte à côte et il est possible de les enchaîner dans la même journée. Bien sûr c'est un gros challenge mais après avoir gravi le mont Elbert, tout me semble possible.
Initialement j'avais prévu de dormir à Silverthorne pour prendre le 1er bus qui partait pour Keystone où après 15 km de marche je rejoignais la zone des sommets.
Mais ce plan est complètement remis en cause car je suis à Frisco et que je n'ai pas acheté de nourriture.
Je commence par attendre le petit déjeuner de l'hôtel qui n'est servi qu'à 7h30. Comme me l'avait précisé Claire et Mathieu, il est exceptionnel. Œufs, saucisses, fruits, gaufres... Même le hiker affamé que je suis ne peut pas en faire le tour.
Je boucle mon sac et je fais mon checkout. La réceptioniste me fait un rabais supplémentaire de 10$. Sympa ! Je commence à me dire que les gens du Colorado sont vraiment acceuillants. J'avais déjà eu un aperçu hier soir au restaurant où Bill, mon voisin de chaise m'avait payé un verre de vin italien qu'il voulait me faire goûter. Je colle mon sac sur le dos et me voilà parti pour faire mes courses chez Walmart (le Carrefour local). Pour cela je dois prendre le bus car le magasin est à côté du terminal.
Je patiente quelques instants à l'arrêt et le bus arrive. Le chauffeur m'accueille avec un grand sourire et me pose plein de questions. Il me demande mon Trail Name et me donne des nouvelles de hikers que je connais et qu'il a pris dans son bus. C'est vraiment une attitude très amicale !
Je fais mes courses. C'est un petit magasin comparativement aux autres Walmart que j'ai déjà fréquenté. Je m'étais habitué à l'agencement et là je ne retrouve pas mes marques. Je perds un temps fou à trouver ce que je cherche. Dehors sur un banc, j'exécute le rituel du déballage, remballage dans des Ziploc de ce que je viens d'acheter. Je suis enfin prêt pour le Trail.
Je me dirige vers le terminal de bus. Il est plus de midi lorsque qu'arrive le bus qui doit me mener à Silverthorne. Il faudra que j'enchaîne avec un autre bus pour Keystone. Tout cela sent très mauvais pour ma journée...
Dès qu'il me voit, le chauffeur du bus quitte son siège et vient discuter avec moi qui ne suis pas loin de lui. C'est un fanatique de marche et son rêve est d'aller dans les Alpes et dans l'Himalaya. Il a fait tout le Colorado en long et en large et connaît tous les sommets.
Il discute tellement passionnément qu'il en oublie l'heure et saute sur son volant et démarre sans cesser de me parler.
Pendant que nous discutons, je vois un hiker qui passe sur le trottoir. Nous nous regardons et nous mettons un moment à nous reconnaître. C'est Swiss Monkey avec son sac sur le dos. Visiblement il est de retour sur le Trail. Je suis content pour lui. Nous nous faisons de grands signes mais le bus part et je ne peux pas lui parler.
Les voyageurs qui sont proches de moi me posent des questions. Avec le chauffeur qui continue de me donner des informations, j'ai l'impression d'être au centre de toutes les conversations. Les gens qui descendent me souhaitent plein de succès pour mon voyage. Visiblement les gens du Colorado adorent tout ce qui touche aux activités extérieures et les gens qui les pratiquent. En tout cas depuis ce matin, je n'ai rencontré que des gens sympas alors que je suis en ville, ultra touristique de surcroît et qui doit vraiment voir passer du monde.
Je finis seul avec le chauffeur dans son bus qui calcule quel est le meilleur arrêt pour faire ce que j'ai prévu. Il m'explique en détail la suite de mon périple pour rejoindre les sommets que je veux faire.
Il me serre la main et me souhaite beaucoup de succès. Je suis complètement sidéré par cet acceuil. J'essaye de me rappeler le dernier chauffeur de bus français qui ne me faisait pas la gueule quand je suis monté à bord... Non je me rappelle pas. Mais j'ai mauvaise mémoire maintenant...
Je me retrouve sur la route et je dois aller à Montezuma pour attraper le Trail. Il y a une 10aine de km. Comme jusqu'à maintenant ça se passe bien avec les locaux, je décide de pousser la chance et de faire du stop. Il y a peu de voitures. Un petit camion arrive et je tends le pouce sans conviction. Je le baisse même alors que le camion est loin et reprends la marche. À ma grande surprise, le camion s'arrête à ma hauteur. Le chauffeur est le portrait craché de Christophe Lambert - qu'il ne doit pas connaitre - et arbore un immense sourire qui ne quitte jamais son visage.
Le camion n'a plus d'âge, la cabine n'a qu'un siège et est rempli de pièces mécaniques de toutes sortes. Je pense être tombé sur un ferrailleur mais lorsque je cale mon sac à l'arrière - "attention à la graisse" me dit-il - , il s'agit plus d'une dépanneuse.
En réalité, je suis tombé sur Géo Trouvetou, le Léonard de Vinci de la clé à molette. Il travaille pour des particuliers mais beaucoup pour l'administration qui l'appelle chaque fois que ses confrères ne trouvent pas de solution. Là il part chez un client qui a décidé de construire sa maison dans une zone d'avalanche à Montezuma. Elle doit résister à tous les chocs et il va s'occuper de mettre en place un groupe électrogène qui répondent aux critères de résistance. La difficulté du chantier le passionne.
Il est bien sûr fanatique de marche et à fait beaucoup de stop quand il était jeune. Il est plein de joie de vivre et c'est un bonheur de passer un moment avec lui. La route est trop courte. Il y a des gens qui dégage de bonnes vibrations. Il en fait partie avec son sourire et son rire cristallin.
Je regarde mon GPS et nous avons dépassé le Trail Head de 2 km. Je repars à pied dans l'autre sens. Il est 14h et je ne sais plus ce que je vais faire.
J'attaque la route forestière (FR).
Visiblement d'après le GPS, je vais devoir avaler une 10aine de km. La FR est très poussièreuse et surtout énormément fréquentée dans les 2 sens. A manger de la poussière, j'ai la tentation de refaire du stop mais je me dis qu'il faut que je marche un peu aujourd'hui et que je profite du paysage. L'activité minière de la vallée que je remonte est marquée. Je trouve que ça a son charme dans le contexte.
Et plus j'avance et plus les montagnes deviennent grandioses. Dire que c'est ce que je vais grimper demain.
J'arrive d'ailleurs à l'intersection du trail qui part vers Argentine Pass, 1ere étape de mon ascension vers les 2 sommets. Je vois distinctement le sentier à flanc de montagne. Il est 17h et cela ne fait aucun sens d'attaquer l'ascension à cette heure tardive. Ça sera pour demain. Je suis aux premières loges. J'installe ma tente et me couche dans l'herbe juste devant. J'ai mon MP3 avec la musique qu'il faut et le soleil comme compagnon au spectacle de ses magnifiques montagnes. C'est bon d'avoir le temps par moment, surtout celui de contempler. Quand est-ce que j'ai fait ça pour la dernière fois ? Je ne parle pas du coup d'œil furtif avec photo à l'appui qu'on regardera quand on aura le temps - c'est à dire jamais. Non, je parle de rester une heure à regarder un paysage évolué sous le jeu des lumières du soleil et des nuages. Pour ma part, cela fait des années... Trop d'années... C'est beau et c'est bon, surtout avec Brassens qui me chante "un petit coin de paradis" dans les oreilles.
Initialement j'avais prévu de dormir à Silverthorne pour prendre le 1er bus qui partait pour Keystone où après 15 km de marche je rejoignais la zone des sommets.
Mais ce plan est complètement remis en cause car je suis à Frisco et que je n'ai pas acheté de nourriture.
Je commence par attendre le petit déjeuner de l'hôtel qui n'est servi qu'à 7h30. Comme me l'avait précisé Claire et Mathieu, il est exceptionnel. Œufs, saucisses, fruits, gaufres... Même le hiker affamé que je suis ne peut pas en faire le tour.
Je boucle mon sac et je fais mon checkout. La réceptioniste me fait un rabais supplémentaire de 10$. Sympa ! Je commence à me dire que les gens du Colorado sont vraiment acceuillants. J'avais déjà eu un aperçu hier soir au restaurant où Bill, mon voisin de chaise m'avait payé un verre de vin italien qu'il voulait me faire goûter. Je colle mon sac sur le dos et me voilà parti pour faire mes courses chez Walmart (le Carrefour local). Pour cela je dois prendre le bus car le magasin est à côté du terminal.
Je patiente quelques instants à l'arrêt et le bus arrive. Le chauffeur m'accueille avec un grand sourire et me pose plein de questions. Il me demande mon Trail Name et me donne des nouvelles de hikers que je connais et qu'il a pris dans son bus. C'est vraiment une attitude très amicale !
Je fais mes courses. C'est un petit magasin comparativement aux autres Walmart que j'ai déjà fréquenté. Je m'étais habitué à l'agencement et là je ne retrouve pas mes marques. Je perds un temps fou à trouver ce que je cherche. Dehors sur un banc, j'exécute le rituel du déballage, remballage dans des Ziploc de ce que je viens d'acheter. Je suis enfin prêt pour le Trail.
Je me dirige vers le terminal de bus. Il est plus de midi lorsque qu'arrive le bus qui doit me mener à Silverthorne. Il faudra que j'enchaîne avec un autre bus pour Keystone. Tout cela sent très mauvais pour ma journée...
Dès qu'il me voit, le chauffeur du bus quitte son siège et vient discuter avec moi qui ne suis pas loin de lui. C'est un fanatique de marche et son rêve est d'aller dans les Alpes et dans l'Himalaya. Il a fait tout le Colorado en long et en large et connaît tous les sommets.
Il discute tellement passionnément qu'il en oublie l'heure et saute sur son volant et démarre sans cesser de me parler.
Pendant que nous discutons, je vois un hiker qui passe sur le trottoir. Nous nous regardons et nous mettons un moment à nous reconnaître. C'est Swiss Monkey avec son sac sur le dos. Visiblement il est de retour sur le Trail. Je suis content pour lui. Nous nous faisons de grands signes mais le bus part et je ne peux pas lui parler.
Les voyageurs qui sont proches de moi me posent des questions. Avec le chauffeur qui continue de me donner des informations, j'ai l'impression d'être au centre de toutes les conversations. Les gens qui descendent me souhaitent plein de succès pour mon voyage. Visiblement les gens du Colorado adorent tout ce qui touche aux activités extérieures et les gens qui les pratiquent. En tout cas depuis ce matin, je n'ai rencontré que des gens sympas alors que je suis en ville, ultra touristique de surcroît et qui doit vraiment voir passer du monde.
Je finis seul avec le chauffeur dans son bus qui calcule quel est le meilleur arrêt pour faire ce que j'ai prévu. Il m'explique en détail la suite de mon périple pour rejoindre les sommets que je veux faire.
Il me serre la main et me souhaite beaucoup de succès. Je suis complètement sidéré par cet acceuil. J'essaye de me rappeler le dernier chauffeur de bus français qui ne me faisait pas la gueule quand je suis monté à bord... Non je me rappelle pas. Mais j'ai mauvaise mémoire maintenant...
Je me retrouve sur la route et je dois aller à Montezuma pour attraper le Trail. Il y a une 10aine de km. Comme jusqu'à maintenant ça se passe bien avec les locaux, je décide de pousser la chance et de faire du stop. Il y a peu de voitures. Un petit camion arrive et je tends le pouce sans conviction. Je le baisse même alors que le camion est loin et reprends la marche. À ma grande surprise, le camion s'arrête à ma hauteur. Le chauffeur est le portrait craché de Christophe Lambert - qu'il ne doit pas connaitre - et arbore un immense sourire qui ne quitte jamais son visage.
Le camion n'a plus d'âge, la cabine n'a qu'un siège et est rempli de pièces mécaniques de toutes sortes. Je pense être tombé sur un ferrailleur mais lorsque je cale mon sac à l'arrière - "attention à la graisse" me dit-il - , il s'agit plus d'une dépanneuse.
En réalité, je suis tombé sur Géo Trouvetou, le Léonard de Vinci de la clé à molette. Il travaille pour des particuliers mais beaucoup pour l'administration qui l'appelle chaque fois que ses confrères ne trouvent pas de solution. Là il part chez un client qui a décidé de construire sa maison dans une zone d'avalanche à Montezuma. Elle doit résister à tous les chocs et il va s'occuper de mettre en place un groupe électrogène qui répondent aux critères de résistance. La difficulté du chantier le passionne.
Il est bien sûr fanatique de marche et à fait beaucoup de stop quand il était jeune. Il est plein de joie de vivre et c'est un bonheur de passer un moment avec lui. La route est trop courte. Il y a des gens qui dégage de bonnes vibrations. Il en fait partie avec son sourire et son rire cristallin.
Je regarde mon GPS et nous avons dépassé le Trail Head de 2 km. Je repars à pied dans l'autre sens. Il est 14h et je ne sais plus ce que je vais faire.
J'attaque la route forestière (FR).
Visiblement d'après le GPS, je vais devoir avaler une 10aine de km. La FR est très poussièreuse et surtout énormément fréquentée dans les 2 sens. A manger de la poussière, j'ai la tentation de refaire du stop mais je me dis qu'il faut que je marche un peu aujourd'hui et que je profite du paysage. L'activité minière de la vallée que je remonte est marquée. Je trouve que ça a son charme dans le contexte.
Et plus j'avance et plus les montagnes deviennent grandioses. Dire que c'est ce que je vais grimper demain.
J'arrive d'ailleurs à l'intersection du trail qui part vers Argentine Pass, 1ere étape de mon ascension vers les 2 sommets. Je vois distinctement le sentier à flanc de montagne. Il est 17h et cela ne fait aucun sens d'attaquer l'ascension à cette heure tardive. Ça sera pour demain. Je suis aux premières loges. J'installe ma tente et me couche dans l'herbe juste devant. J'ai mon MP3 avec la musique qu'il faut et le soleil comme compagnon au spectacle de ses magnifiques montagnes. C'est bon d'avoir le temps par moment, surtout celui de contempler. Quand est-ce que j'ai fait ça pour la dernière fois ? Je ne parle pas du coup d'œil furtif avec photo à l'appui qu'on regardera quand on aura le temps - c'est à dire jamais. Non, je parle de rester une heure à regarder un paysage évolué sous le jeu des lumières du soleil et des nuages. Pour ma part, cela fait des années... Trop d'années... C'est beau et c'est bon, surtout avec Brassens qui me chante "un petit coin de paradis" dans les oreilles.
bonjour Némo
RépondreSupprimernous suivons toujours tes aventures avec grand plaisir. Il a du te falloir pas mal de courage quand délaissé par des deux compagnons de voyage tu as du reprendre seul le CDT....et oh surprise, magic trail, tu les retrouves. Mais tu continues encore seul...et là c'est un plaisir que de te voir aussi heureux! profite bien, gros bisous
PS: shiva est montée sur une arête à 3760 m (le Rateau Ouest) et...elle était fière de son sommet mais pas mécontente de redescendre!
J'aurai bien continué avec eux ou même d'autres (vous faites quoi cet été ?) mais il faut être un peu tapé pour s'envoyer le CDT au complet. En tout cas, ça a été un immense plaisir de les avoir avec moi.
SupprimerBravo à Shiva pour son sommet ! Dans les Alpes, ça vaut 10 fois ce que je fais dans le Colorado ! Respect. Happy Trails.